mercredi 30 novembre 2011

Playlist #17 : Perfect World

C'est donc la première fois depuis Juin 2010 que je ne parviens pas à écrire quoi que ce soit pendant un mois. Je vous avoue que je ne suis pas fier du tout. Je n'avancerai aucune excuse (bien que l'institution universitaire m'invite plus volontiers à réfléchir aux salariés mis à disposition qu'aux dernières sorties indie-pop), et je vais de ce pas m'auto-flageller. J'espère pouvoir écrire un peu autour de la trêve de Noël et du nouvel an, parce que c'était quand même la base de ce blog, et que je n'ai pas envie que cela se perde! Au-delà de tout ça, pas grand chose à signaler, tout va bien je vous rassure. Je n'ai pas live-reporté mes derniers concerts, donc je vous redirige vers Manon, qui n'oublie pas son clavier, et qui a fort bien décrit de quoi il s'agissait, pour Yuck à Montpellier (=>) comme pour The Babies au Saint des Seins (=>).
Bref, je vous rappelle que soundcloud ne me permet d'uploader que deux émissions à la fois, donc les #1 et #2 ont disparu, c'est triste mais c'est ainsi.
L'image du mois est le complément nécessaire de l'image du mois dernier. Parce que rire bêtement, c'est important.

Chocolate, Love, Sex. #3 (=>)
Real Estate - It's Real
Yuck - Milkshake
Teenage Fanclub - Everything Flows
Lilys - Ginger
Cloud Nothings - Forget You All The Time
The Wedding Present - Everyone Thinks He Looks Daft
Veronica Falls - The Fountain
The Jesus & Mary Chain - Some Candy Talking
The Radio Dept. - Pulling Our Weight
Korallreven - As Young As Yesterday
Washed Out - Call It Off
The Bilinda Butchers - Careless Teens
My Bloody Valentine - Soon

Chocolate, Love, Sex. #4 (=>)
La Femme - Sur La Planche
Neon Indian - Hex Girlfriend
Teen Daze - Gone For The Summer
Youth Lagoon - Montana
St. Christopher - It's Snowing On The Moon
The Fairways - KLM Line
My Finest Hour - She Fakes Apples
Mary-Go-Round - Locked
The Proctors - Perfect World
The Pains Of Being Pure At Heart - Tomorrow Dies Today
Ringo Deathstarr - Starrsha
The Raveonettes - Recharge & Revolt
The Wendy Darlings - Get Up
Ride - Leave Them All Behind

lundi 31 octobre 2011

Playlist #16 : The State I Am In

Ce mois d'Octobre était voué aux bouleversements en tous genres. En tout premier lieu, je tiens à m'excuser pour le nombre particulièrement réduit d'articles écrits ce mois-ci (un seul, en l'occurrence, le second étant ce que vous êtes en train de lire), loin du rythme que j'avais plus ou moins toujours tenu jusqu'ici. J'en suis le premier désolé, mais les choses sont ainsi : je suis un peu débordé par ma vie en ce moment, et l'écriture passe malheureusement à la trappe (il fallait bien choisir quelque chose). Car entre les études (la plus mauvaise excuse vu mon volume horaire de cours), une jolie histoire (je n'en dis pas plus), et les passages de Chocolate, Love, Sex. par la case radio, je ne sais plus où donner de la tête!
Bref, puisque j'évoque le cas de cette émission de radio, qui génère un suivi dont je suis le premier surpris (je remercie d'ailleurs tous ceux qui ont la curiosité de pencher une oreille là-dessus), c'est l'occasion d'un petit changement pour la rubrique "playlist" de ce blog, qui accueillera désormais sous forme textuelle le contenu des émissions en question. Puisqu'elles sont, à mon sens, des playlists de fait, je pense qu'il n'est guère nécessaire d'en rajouter, et je préfère vous les détailler, plutôt que de souligner encore des morceaux de plus. C'est un choix, sans doute contestable, et je vous laisse donner votre avis.
Pour finir, et à propos des podcasts, les limitations inhérentes aux comptes soundcloud m'obligeront semble-t-il à ne pas stocker plus de deux émissions sur leurs serveurs. Autrement dit, quand l'émission #3 sera mise en ligne, le #1 devra être retirée. Je garde cependant une copie de chaque podcast, donc si par hasard (ou masochisme, je ne sais pas), vous êtes intéressés par des choses devenues indisponibles, faites-le moi savoir, je transmettrai par un autre biais.
L'image du mois en fera, à coup sûr, sourire certains. Et sourire, c'est important.


Chocolate, Love, Sex. #1 (=>)
Belle & Sebastian - The State I Am In
Camera Obscura - I Don't Do Crowds
Math & Physics Club - Jimmy Had A Polaroid
Allo Darlin' - Darren
Red Shoe Diaries - Underage Disco
The Pains Of Being Pure At Heart - Say No To Love
Seapony - Nobody Knows
The Field Mice - If You Need Someone
Craft Spells - Scandinavian Crush
Young Dreams - Young Dreams
The Hit-Parade - My Favourite Girl
The Smiths - Heaven Knows I'm Miserable Now
Los Campesinos! - You! Me! Dancing!

Chocolate, Love, Sex. #2 (=>)
The Ice Choir - Two Rings
The Depreciation Guild - My Chariot
Galaxie 500 - Tugboat
The Magnetic Fields - Love Goes Home To Paris In The Spring
Felt - Rain Of Crystal Spires
The Pastels - Breaking Lines
The Sea Urchins - Pristine Christine
Brighter - Does Love Last Forever?
Reading Rainbow - Wasting Time
The Drums - What You Were
Housse de Racket - Chateau
Alex Beaupain - Sur Toute La Ligne
New Order - The Perfect Kiss (12' Version)

samedi 22 octobre 2011

Un album #10 : Belle And Sebastian - If You're Feeling Sinister [1996]

Il y a des albums, comme ça, qui non seulement nous touchent, mais qui en plus, restent avec nous, allez savoir pourquoi. Des albums qu'on connaît plus que par coeur, et qu'on écoute pourtant plus que régulièrement. Des albums qui nous touchent, et en même temps, nous rassurent. Des albums dans lesquels on rentre comme dans un lieu où l'on se sentirait bien, isolé de tous les tracas, isolé du reste du monde et de ses turpitudes. Des albums où chaque chanson raconte son histoire, et où chacune de ces histoires peut se voir appropriée, comprise. Il est, tout simplement, des albums marquants, qu'on vit avec une intensité qui dépasse parfois un peu le cadre de l'amour de la pop-song, pour glisser dans l'irrationnel. Le deuxième album des écossais de Belle & Sebastian, If You're Feeling Sinister, sorti en Novembre 1996 chez Jeepster Records, fait partie de ces albums dont on ne saurait trop décrire l'importance. Quoique l'on puisse toujours essayer d'expliquer ce qu'on peut ressentir à leur écoute ...


Dès The Stars Of Track And Field (=>), le ton de l'oeuvre est donné : Stuart Murdoch chante d'une voix incroyablement sensible, tout juste soutenu par une guitare acoustique discrète. La fragilité terrible de son chant dit tout de ce qu'offrira la musique du groupe de Glasgow : un instant de grâce merveilleux, une sensibilité totale exprimée dans des chansons qui figurent comme autant de souvenirs, de moments de vie chuchotés. Les apparitions de la guitare électrique de Stevie Jackson touchent la beauté, les arrangements sont d'une douceur fabuleuse (cette trompette ...), et s’épanouit ainsi un morceau intouchable. Le plus incroyable étant qu'il y en aura neuf autres, à commencer par Seeing Other People (=>), menée par un piano presque coquin au creux d'un presque sourire, et de réverbérations éclairées. La mélodie porte une facilité majestueuse, une impression de simplicité éloquente, et on sort du morceau par un fade-out malicieux. Survient ensuite, sans trop prévenir, le rythme effréné de Me And The Major (=>), et son harmonica désaxé. Un morceau touchant dans cette transition entre un couplet qui passe à une vitesse folle, et ce refrain où le temps semble reprendre son droit, où une nappe sonore pose les choses, laisse s'engouffrer la mélodie, pour enfin mener vers une outro dans laquelle le chant de Stuart se mue en tourbillon ("And the snow is falling, falling, falling, falling ..."), l'harmonica en douleur profonde, la météo en tempête troublante.


Le duo suivant va définitivement faire basculer le disque dans la déraison intime. Like Dylan In The Movies, en premier lieu, fait souffler le vent d'une mélancolie totale, et d'une solitude écorchée. Du "Take a tip from me/Don't go through the park/When you're on your own/It's a long walk home" qui plante un décor forcément légèrement triste, au refrain en forme d'envol sur des cordes ("If they follow you/Don't look back/Like Dylan in the movies ..."), la composition atteint un sommet de délicatesse qui peut nous ébranler sans la moindre difficulté. Viendra ensuite le pont aux paroles les plus fulgurantes et vraies qui puissent être, à tout jamais ("Yes you're worth the trouble/And you're worth the pain/You're worth the worry/I would do the same/If we all went back/To another time/I would love you over/I would love you over/I would love you ..."), un pont qui laisse sur son passage le vent de sentiments dispersés mais pleinement vécus. Comment imaginer, alors, que le relais puisse être pris par une chanson aussi attendrissante que The Fox In The Snow (=>), qui épuise son frêle piano au travers d'une ritournelle à la mélodie caressante, et d'histoires qu'on ne comprend pas vraiment mais auxquelles on s'identifierait si vite. Et quand, dans un final à la grandeur éclatante, les voix de Stuart et de Stevie se répondent, on mesurerait presque à quel point Belle & Sebastian peuvent atteindre les émotions les plus pures, les sensations les plus flamboyantes.


On retrouve bien vite un sourire timide en se plongeant dans Get Me Away From Here I'm Dying (=>), délice entraînant qui porte l'auditeur dans une lumière rassurante. On danserait presque timidement, si le refrain ne menait pas à une forme de questionnement profond ("I always cry at endings ..."). Au fond, rien ne dépasse jamais la folie de ces chansons qui étreignent, font presque bouger, en mélangeant pourtant à cela des blessures bien réelles, des coeurs brisés, des impasses déprimantes. Pop-song et ambiguïté du propos, j'ai déjà évoqué le concept. L'ambguïté que l'on retrouve avec ces cris de cour de récréation qui habillent le commencement d'If You're Feeling Sinister (=>), à l'instrumentation remarquable (ce piano qui vient ponctuer une guitare acoustique qui court sans savoir où elle va). Je ne m'attarderai pas sur le caractère ouvertement religieux du récit, mais il faut bien avouer que les personnages décrits par les paroles de Stuart Murdoch suscitent sans mal ce regard troublé, cette impression que l'on peut être complètement perdu, que le sens n'est pas forcément là où on l'imagine. Suit la charmante Mayfly (=>), où la guitare électrique éclaire le moindre espace d'une lumière fatale. Allez savoir ce que Stuart raconte, peut-être qu'il attend quelqu'un en s'oubliant avec une autre, ou peut-être autre chose, quelle importance au fond? On se contentera sans hésiter de ce solo survenu comme un des plus beaux miracles de l'indie-pop, désarmant d'élégance et d'à propos.


The Boy Done Wrong Again (=>). Je ne sais pas si dire que cette chanson est émouvante suffirait. Je ne sais pas s'il est facile de pleurer, ni même si je pleure facilement, mais cette chanson m'a toujours bouleversée, marquée au plus profond, ne serait-ce que par sa mélodie innocente, ses cordes qui s'épanchent, comme brisées par le poids de sentiments trop lourds à porter. La voix de Stuart reste, tout le long, d'une admirable dignité, car on sent bien qu'il craque avec fierté, que sa tristesse est vécue avec sincérité, et retranscrite exactement comme elle a été vécue ("All I Wanted was to sing the saddest song/And if you would sing along/If you'd only sing along/I would be happier"). Enfin, Judy And The Dream Of Horses (=>) vient conclure et remporter la mise, sur la base d'un personnage de plus, une jeune fille presque délurée, au destin déroutant, et qui écrit des chansons au sujet de chevaux qu'elle croise dans ses rêves. Les vies décrites dans l'album sont presque les nôtres, sauf que pas tout-à-fait. La solitude est souvent présente, comme une forme d'hésitation à être pleinement, et avec elles un chagrin mignon comme tout. Judy fait résonner une flûte tout bête, des cuivres sans la moindre amertume, dans une mélodie à la perfection joueuse, espiègle. Comme si l'évidence était atteinte sans s'en rendre compte. Comme si l'irrationnel d'un album hors du temps, des modes et des codes, était au rendez-vous d'une rencontre heureuse.

vendredi 30 septembre 2011

Playlist #15 : September('s not so far away)

Comme le souligne fort justement un penseur-drogué en introduction de Blood Freak, nanar le plus impossible de l'histoire de l'humanité, "Nous vivons dans un monde sujet à de constants changements." Pour tout vous dire, Chocolate, Love, Sex., cher espace d'expression, n'échappe pas à la règle. Je vous avouais le mois dernier avoir postulé pour bénéficier d'un créneau horaire musical chez CampusFm, et je suis en mesure, à l'heure où j'écris ces lignes, d'apporter les dernières précisions à ce projet, et d'annoncer précisément ce qu'il en sera.
Très officiellement donc (et je le dis avec une certaine fierté, oui oui oui), vous pourrez retrouver Chocolate, Love, Sex. sur les ondes un Jeudi sur deux, de 21h à 22h, ma première apparition étant fixée le Jeudi 13 Octobre! Le concept est plutôt simple : une heure de musique consacrée à l'indie-pop au sens large (donc à d'autres futilités), concoctée avec tout mon amour (oui, rien que ça!), entrecoupée d'interventions pour montrer que, même si je n'ai pas grand chose à dire (quoique, sait-on jamais ?), je ne vous laisse pas seuls. Si par hasard vous disposez d'un poste de radio et que vous vous situez à Toulouse, branchez-vous simplement sur 94FM. Si vous êtes de plus loin, ou que vous estimez archaïque l'outil radiophonique, un ordinateur connecté à internet vous suffira pour vous rendre sur www.campusfm.fr, et pour lancer le streaming.
Bref, ceci étant posé, plusieurs autres choses. D'abord, au cas où vous vous poseriez la question, je n'abandonne à l'évidence pas ce lieu pour autant, ni mes écrits cybernétiques. Reste que, face à un emploi du temps qui s'annonce particulièrement chargé (université oblige), je ne sais pas quel rythme je vais pouvoir tenir dans ma tentative de conciliation du nombre incalculable de choses que j'ai à faire. Si rien ne dit que je manquerai de temps, rien ne dit non plus que je vais avoir de la marge. Je ferai mon possible, mais je ne peux rien promettre.
Enfin, je tenais aussi à évoquer (car cela n'a pas donné lieu à "Live report") les concerts organisés dans le cadre du printemps de Septembre (un "Festival de création contemporaine" annuel et Toulousain) le week-end dernier. Car, dans le cadre impressionnant et inhabituel de l'auditorium St-Pierre-des-Cuisines, j'ai été séduit le Vendredi 23 par l'immense fêlure propre à la musique de François Virot (en résumé, coeur brisé, accords violentés, humeur souffrante), puis par la grâce détachée de Ramona Còrdova (en résumé, arpèges lumineux, voix d'ange et gentil hors-sujet), avant le lendemain, de danser contre vents et marées au son du très bon duo électronique Splash Wave (en résumé, Kraftwerk/Air/New Order sur un bateau, baguettes fluorescentes, et mélodies synthétiques de qualité). Merci infiniment, au passage, au gens qui m'ont accompagné, et avec qui j'ai partagé, chacun de ces deux soirs, des afters particulièrement agréables!
Pas d'image du mois, et ne me demandez pas pourquoi, je n'en sais rien.

1/ Splash Wave - Passing Breeze (sur l'EP Le Podium #2 : Splash Wave, sorti chez Third Side Records en 2011)
Jolie surprise.

2/ Teen Daze - Let's Fall Asleep Together (sur l'EP Beach Dreams, auto-distribué en 2010)
Tant que l'été ne veut pas finir ...

3/ Youth Lagoon - Montana (sur l'album The Year Of Hibernation, sorti chez Fat Possum en 2011)
De l'émotion, beaucoup d'émotion.

4/ The Record Summer - Put You Out (sur l'EP Race To The Bottom, sorti chez Catclick Records en 2010)
L'autre obsession du mois.

5/ Wild Nothing - Live In Dreams (sur l'album Gemini, sorti chez Captured Tracks en 2010)
Because our lips won't last forever/And that's exactly why/I'd rather live in dreams ...

6/ Veronica Falls - The Fountain (sur l'album Veronica Falls, soti chez Bella Union en 2011)
Et cet album pour le moins craquant.

7/ The Field Mice - September's Not So Far Away (sur le single September's Not So Far Away, sorti chez Sarah Records en 1991)
S'il fallait tout résumer ...

8/ Teenage Fanclub - Sparky's Dream (sur l'album Grand Prix, sorti chez Creation Records en 1995)
Toujours aussi incroyable, cette chanson.

9/ Jens Lekman - Your Arms Around Me (sur l'album Night Falls Over Kortedala, sorti chez Service en 2007)
Pour tous ceux qui ne savent pas utiliser correctement un couteau.

10/ Belle & Sebastian - Sleep The Clock Around (live au Studio 105 de la Maison de la Radio à Paris, le 5 Octobre 1998)
Dormir, dormir, et dormir encore ...

mardi 27 septembre 2011

Out This Week #10 : Youth Lagoon - The Year Of Hibernation

Les choses vont de plus en plus vite. On imagine que cette idée doit traverser, à l'occasion, l'esprit de Trevor Powers, un garçon de 22 ans qui vit à Boise, dans l'Idaho. Un garçon qui, comme tant d'autres (mais avec un talent certain), donne corps, depuis sa chambre d'étudiant, à ses songes musicaux, façon DIY et interminables nuits blanches. Le résultat (July et Cannons, découvertes en binôme), à peine posté sur bandcamp au printemps, a immédiatement suscité l'intérêt de la blogosphère omnisciente, qui s'est chargée de faire monter, comme il se doit et en tout juste un été, la pression entourant la sortie possible d'un premier album de ce projet nommé Youth Lagoon. De quoi permettre au jeune américain de trouver des labels bienveillants (Lefse Records pour l'Europe, et surtout, la respectable maison Fat Possum pour son pays d'origine) pour sortir, en cette dernière semaine de Septembre (accompagnant par là-même un début d'automne drôlement ensoleillé), le magnifique disque qu'est The Year Of Hibernation.


Le lancement est confié à Posters, qui pose sans attendre l'ambiance très particulière au creux de laquelle Youth Lagoon nous plonge : piano osseux, ravagé, et vapeurs synthétiques comme un enveloppant brouillard. La voix de Trevor Powers est d'une incroyable fragilité, tremblant comme une feuille emportée par la brise, suscitant l'émotion par sa trajectoire incertaine. Puis le morceau s'échappe dans un beat épuré, dévitalisé, alors qu'une guitare entre sublimer la mélodie. Le ton est donné : l'album sera grand, mais surtout touchant. Cannons propose le premier enchaînement. Ce qui frappe, c'est l'espace laissé aux mélodies pour s'exprimer, cette capacité à ménager un silence, qui viendra souligner à quel point le piano se montre désespéré, mais vivant. Entre cette boîte à rythmes fusillée, cette guitare en équilibre, ces traînées de reverb, et toujours ce chant indéchiffrable, on se trouve au beau milieu de sentiments forts, parfois contradictoires (comment une si belle lumière peut-elle être si triste ?). Afternoon vient ensuite glisser un soupir malicieux (l'introduction est un modèle de grâce), et faire souffler un intense espoir adolescent, par le biais d'une rythmique puissante, d'un envol épique. On s'imagine bien courir vers nulle part, les poumons gonflés d'air pur, et de sentiments à faire éclater à la face du monde.



Suit Seventeen, qui avance en titubant, autour des hésitations, encore et toujours, d'un piano lunaire, parcimonieux, et de cette voix frêle comme jamais. La composition semble totalement dépassée, ouvrant un intime bousculé, une solitude totale, face à un univers aveugle. Puis vient July, qui ne tient au départ debout qu'à la faveur d'un frémissement vaporeux. Trevor Powers y joue soudain des vocalises enchantées, lançant pour de bon une chanson qui voit les élements s'agglomérer (basse plombée, guitare au coeur serré) pour construire en définitive un édifice tourbillonnant, une ritournelle renversante, particulièrement quand le chant, exalté, devient d'une beauté bouleversante. Day Dream constitue dans la foulée une surprise, tant le beat y rappelle une musique électronique plus classique et surtout plus enjouée. La légèreté se mue pourtant rapidement en ambiguïté, d'autant que la chanson ne manque pas de détours inquiétants, de regards étonnés, d'équilibres précaires. On ne sait absolument plus sur quel pied danser, mais l'expérience est une curiosité, et sans doute une respiration.


La grande chanson de l'album arrive : c'est à mon sens Montana qui mérite les honneurs. Le piano infatigable paraît soudain presque solennel, mais le chant demeure chargé de vulnérabilité. On capte quelques mots, comme ces lignes délicates qui évoquent une espérance souffrante mais bien réelle ("A door is always open if it isn't closed/And a plant is said to be dead if it doesn't grow./I will grow, I will grow ..."). L'atmosphère rassemble les souvenirs d'une nuit sans lune, de laquelle jaillissent mille pensées, guidées là par les bruits singuliers de l'obscurité reproduits par un clavier qui vibre et s'épanche. La montée qui débute alors est inexorable de perdition, le vent souffle (et la mélodie avec lui), dévaste les certitudes, remet tout en question. On ne sort pas indemne d'un morceau pareil, car les sentiments y sont éprouvés jusqu'à faire émerger d'impossibles évidences. Reste à conclure, ce que fera à merveille The Hunt, plume énigmatique (ce glockenspiel ...), douceur rassurante, et guitare alerte, comme pour dessiner finalement un sourire au sortir d'une épreuve (serait-ce, justement, cette année d'hibernation ?) dans laquelle, si tout n'a pas été facile, les choses auront été d'une rare beauté.

jeudi 22 septembre 2011

Un album #9 : Lilys - A Brief History Of Amazing Letdowns [1994]

Comment aller de l'avant ? C'est peut-être la question que se pose Kurt Heasley, leader du groupe Bostonien Lilys, un an après la sortie en 1992 du bijou shoegazing In The Presence Of Nothing (chez Slumberland Records). Le bonhomme tente donc une réponse : il fait presque entièrement table rase du line-up qui l'accompagne, migre vers spinART Records (un label New-Yorkais, nettement moins "marqué", il faut bien le dire, que Slumberland dans ses choix), et laisse un peu de côté My Bloody Valentine, son influence de toujours, pour glisser dans une pop à guitares directe et frondeuse. Le résultat, c'est l'enregistrement, en Février et Mars 1993, du mini-album A Brief History Of Amazing Letdowns, qui sort en Mars 1994. Tout juste six morceaux planqués derrière une pochette quasi-nanarde (non mais ce petit truc tout rond avec un sourire de psychopathe, franchement ?), pour une oeuvre de transition, dynamique et éclairée.

Lilys n'hésite pas une seconde, et lance les hostilités de la plus belle des manières en envoyant la magistrale Ginger (=>). Comment ne pas être soufflé par cette guitare qui sonne comme dans un rêve ? Le bruit caractéristique d'une légère fuzz sur des accords déliés, qui tissent une mélodie gonflée d'un espoir vibrant. La voix de Kurt Heasley est tremblante, mal assurée, mais jamais vraiment hésitante, et ouvre son texte par une image touchante ("When you leave it will be cold outside ..."). La composition va se plaire à explorer des terrains inconnus, des breaks improbables mais inévitablement attachants, quand les montées, frappées ou bruitistes, se muent en envols excitants, laissant pourtant toujours la place, en définitive, à ce couplet qu'on savoure les yeux fermés ("And she comes and she goes but she mostly goes ...") et la tête secouée (cette ligne de guitare, jouissive comme pas permis). Dans la foulée, on passe à deux sucreries chronométrées à moins de deux minutes, à commencer par Ycjcyaqfrj (=>), qui calme le rythme, avant de dévoiler une vraie délicatesse, une voix endormie, une basse ronde et douce, une guitare qui éclate dans un delay tournoyant. Le propos, volontairement raccourci, pose une histoire minuscule, et pour tout dire, attendrissante. Il en est un peu de même, ensuite, avec Any Place I've Lived (=>), un mid-tempo à la mélodie éclatante, pareille à un sourire timide mais sincère. Un balancement léger qui pousse à reprendre doucement les "Hey hey, my friend" inauguraux, puis à se perdre dans un horizon lointain à l'instant où Kurt Heasley, malicieux jusque dans sa drôle de tristesse, demande : "Do you think you can bring me up/Like you bring me down ?/Down down shoo bop ..." Un instant pop ultime, à la simplicité désarmante.

On trouve à la suite Jenny, Andrew And Me (=>), qui renoue avec des durées plus importantes, et qui surtout, plonge dans une mélancolie acidulée et ensoleillée. Encore une fois, et face à des paroles un peu illusoires (quoique, le "It's just because you have a car, just because you have a car ..." final se laisse aimablement chantonner), c'est une guitare intense et exaltée qui porte le morceau, orchestrant à merveille les moments où les sentiments débordent (ce solo, comme un naufrage sublimé), et ceux où le coeur connaît une fêlure intime. Enfin, ou presque, Dandy (=>) bazarde son petit côté branleur, en restant pourtant en permanence sur le fil d'une fragilité portée en étendard par un chant qui ne cache pas sa vulnérabilité. Les choses coulent avec une aisance renversante, chaque accroche semble décisive et parfaitement pensée. Largement de quoi oublier facilement Evel Knievel, dernière piste expérimentale et abstraite au point de sembler inutile. Qu'importe donc, car en cinq chansons fatales, Lilys parviennent à un mini-album fulgurant, de ceux qui font souffler un vent d'évidence par lequel on se laisse volontiers emporter ...

jeudi 15 septembre 2011

Chez Sarah #16 : Brighter - Noah's Ark [SARAH 27]

En à peine 5 années d'existence (de 1989 à 1993), Brighter auront illuminé Sarah Records. Au travers de 4 singles (dont un EP de 5 titres) et un album, le groupe de Keris Howard (futur Harper Lee), Alison Cousens et Alex Sharkey avait trouvé ce son d'une incroyable douceur, écrit ces compositions aux lignes voilées, décrit ces impressions fugaces qui collent si bien aux sentiments, ravagé les cœurs de ceux qui avaient voulu se laisser emporter par cette tristesse diffuse mais éclatante. Une discographie parfaite, désarmante, qui s'était ouverte en 1989 par Around The World In Eighty Days, déjà évoqué en ces pages, et qui se poursuivait en Février 1990 par ce single intitulé Noah's Ark. Les galets maladroitement disposés, cette pochette de bord de mer, en disent déjà long sur les trois pop-songs rencontrées sur ces 7 pouces : c'est innocent, exalté, le temps passe à une vitesse qu'on ne peut raisonnablement expliquer, et ça rêve beaucoup, énormément même, d'un ailleurs, plus loin que l'horizon ... En avant, pour la référence numéro 27.

La face-A, donc, pour Noah's Ark (=>). Du Brighter caractéristique, si j'ose dire : une guitare acoustique jouée avec une infinie paresse, une électrique, en arpèges, à la sublime luminosité. Keris Howard entre, et on sent immédiatement dans sa voix toute la mélancolie possible. Ses premiers mots sont, en effet, résolument évocateurs : "I say goodbye and I sadly smile./Has it all been worthwhile, or a waste of time ?/Just a waste of time." Un regard en arrière déchirant, qui pose à lui seul l'atmosphère d'une chanson qui vogue longtemps et lentement sur une mélodie feutrée, aux timides variations. Brighter dépeint ainsi ces instants foudroyants, quand les yeux deviennent humides, quand les regards se perdent sur des ciels de traîne, quand plus rien n'a réellement de sens. Puis le tourbillon débute sans prévenir, après que la guitare électrique ait pris le pouvoir, soutenue par un synthé usé : une batterie, si rare, vient irradier d'émotions ce final égaré, où ne nous parviennent plus que des "la la la" qui s'envolent, dispersés par le vent, comme les cheveux sur les visages des jeunes filles quand souffle une brise délicate.

Deux morceaux sur la face-B, à commencer par I Don't Think It Matters (=>). Le ton se fait plus léger, et le soleil semble revenir (après le déluge ?). Un Brighter printanier en quelque sorte, à peine sucré, tout juste souriant, accompagné de mots qui ressemblent à l'amour (même si l'on peine à les déchiffrer), puis ce "I don't think it matters then/Should it matter ?", forcément touchant, car glissé avec assurance, et même une pointe de malice. La mélodie, tout au long de ces trois minutes, rassure et cajole, car elle est simple et clairvoyante. Reste tout de même une question bien légitime : Does Love Last Forever ? (=>) Le tempo est en tous cas pour le moins enjoué, incitant à un optimisme dont on espère qu'il guide la réponse. On esquisse sans mal des pas de danse, en laissant pourtant notre cœur s'arrêter juste après le refrain, quand la boite à rythmes se tait pour mettre brièvement en valeur l'évidence et la pureté de la ligne de guitare. Keris Howard chante de sa voix raffinée et insaisissable des mots trop vite échappés, animés d'une excitation sincère. On sait bien que la réponse à la question n'arrivera jamais vraiment. Ou peut-être que si, finalement, quand un pied allume une pédale de fuzz jouissive, du genre à se sentir terriblement vivant, du genre, aussi, à promettre que l'espoir est permis.

jeudi 8 septembre 2011

Live report #11 : Jeremy Jay + Rubycube @ Le Saint des Seins

Tous à vos cartables, c'est la rentrée! Et dans notre nouvel agenda (sur lequel on écrira durant l'année plus de conneries que de devois à faire) trônait dès ce Mercredi 7 Septembre un concert estampillé FriendsOfP (=>). J'ai donc pris le court chemin menant au Saint des Seins, avec le retard qui me caractérise habituellement, pour y retrouver l'agréable trio féminin DanceToTheTuner (=>) / FuckTheClock (=>) / Don'tCallItArt (qui n'a pas de blog, car elle ne goûte peut-être pas le "plaifir narfifique d'écrire"). Tête d'affiche ce soir pour Jeremy Jay, jeune homme venu de Los Angeles, et à qui j'avais décidé d'accorder ma confiance en vertu de sa signature dans cette bonne vieille maison qu'est K Records, et ce même si je ne m'étais penché sur son cas (via Dream Diary, sorti en 2011) qu'à 20h le soir même. Autant donc vous dire qu'il s'agissait pour moi d'une vraie découverte. Les conditions de jeu vont largement peser sur la rencontre : il fait un peu lourd, donc un peu chaud (à la rigueur, peu importe), mais le public est clairsemé (la concurrence de Martine Aubry ?) et particulièrement bavard (faut bien se raconter ce qu'on a fait de son été ...).

La première partie était confiée aux locaux de Rubycube (=>). Cinq garçons jeunes, voire même très jeunes (enfin, je ne vais pas essayer de les dater au Carbone14, puis la dernière fois que j'ai dit que quelqu'un avait l'air jeune, j'ai cru que je m'étais transformé en Dieudonné de la scène rock toulousaine), aux looks que l'on qualifiera de "travaillés", et qui jouent une musique très grandement influencée par Foals (guitares angulaires, rythmique glaciale, chant faussement possédé). Alors on va faire simple, déjà c'est carrément pas ma came sur le principe (disons que ça me donne envie de se poster en fond de salle et de commander une pinte, ce qui a très exactement eu lieu). Mais on en a vu d'autres relever le truc et me convaincre, sauf qu'en l'occurrence ... Enfin bref, ils sont jeunes quoi (je sais, je me répète), donc ils ont le temps de s'améliorer, peut-être aussi d'avoir des idées moins caricaturales, et d'écrire un peu mieux. Faut bien commencer quelque part, d'une façon ou d'une autre, puis laisser le temps aux choses de se faire. Alors on en reparle dans 2 ou 3 ans, si j'ai pas foutu le camp entre temps.


Je le concède donc volontiers, je n'avais aucune connaissance du répertoire du sieur Jeremy Jay (=>), un grand garçon très attachant, qui semble plutôt timide, quoiqu'accessible. Il se charge du chant et de la guitare, au sein d'un quatuor de format classique : batterie, basse et claviers l'accompagnent, tous plutôt souriants. Nous nous avançons donc rapidement pour profiter des compositions construites sur le format d'une pop minimaliste et anachronique, et qui, bien qu'inconnues de mes oreilles, font indéniablement leur effet, dégageant une atmosphère très particulière : sur un tempo le plus souvent légèrement sautillant, les mélodies, d'un classicisme fou, se font accrocheuses, portées par le jeu de guitare nonchalant de Jeremy, qui dissout la facilité dans l'évidence. On se laisse aussi bercer par sa superbe voix, plongée dans une reverb d'un autre temps, à la douceur triste et désarmante. En fermant les yeux, avec un peu d'imagination, on croit entrevoir les paysages d'une Californie mélancolique, ces ciels bleus mais devenus froids, d'une fin d'été où les souvenirs ressemblent à des mirages. En définitive, ce set d'une petite heure au romantisme désabusé, conclu par deux rappels solitaires (chaleureusement demandés, il faut le signaler), aura provoqué un spleen d'une beauté fatale, et c'était, je crois, très bien comme ça. D'autant que pour la bonne humeur, la suite de la soirée, entre épicerie de nuit et casseroles musicales, jusqu'à un sacré dépassement horaire, fut une réussite.

mardi 6 septembre 2011

Un single #26 : Shimmering Stars - East Van Girls / I'm Gonna Try EP [2010]

Pour rester factuel, il faudrait présenter Shimmering Stars comme un - désormais - trio (ne vous étonnez pas si vous trouvez des photographies où ils sont quatre) venu de Vancouver, ou de sa lointaine banlieue. Mais il serait dommage de rester aussi réducteur, à l'heure où la formation menée par Rory McClure (qui compose seul) sort son premier album, Violent Hearts (chez Hardly Art, la semaine prochaine). C'est, en effet, un frisson passéiste mais divin qui guide la musique de ces jolies étoiles, plongée dans une atmosphère résolument 60's : propos concis, reverb à tous les étages, production Spectorienne, morceaux intenses et ravagés. Pour faire simple, écouter Shimmering Stars, c'est remonter dans le temps pour vivre des émotions virginales. Quel meilleur exemple, à ce titre, que leur premier EP, East Van Girls / I'm Gonna Try (=>), sorti sur microsillon en Novembre 2010, hébergé par la structure française Almost Musique, et édité à 500 exemplaires.


La face-A s'ouvre sur East Van Girls, qui met tout le monde d'accord en moins de deux minutes, sur la base d'un riff garage acidulé. Ambiance Vivian Girls, Best Coast, et tous ces gens qui ont rêvé d'être dans un girls-band au point de vouloir faire la même chose, peu important que l'époque ne s'y prête plus aussi bien. On se régale de ce chant envolé, des ces harmonies vocales comme autant de caresses, et surtout de cette mélodie qui se balance, monte et redescend comme un vieux manège nous emporte (et puis ce pont ...). Ce qui marque surtout, c'est la terrible simplicité et l'impression de facilité qui se dégagent, portrait idéalement ensoleillé d'une jeunesse incandescente. On continue avec Believe, qui tombe de rythme, et glisse par ses arpèges délicats vers la balade majestueuse. La batterie agite rapidement l'ensemble de convulsions émotionnelles, rendant à l'instant cet espoir fou qui le caractérise, cette puissance sentimentale façon tourbillon incontrôlable.


Côté face-B, on trouve d'abord I'm Gonna Try, que je considère comme le plus bel exploit du sieur McClure. Sur une guitare acoustique désuète vient se tisser une mélodie à la mélancolie prégnante, tandis que les paroles vont encore plus loin en évoquant le désespoir adolescent. On navigue entre violence pure ("Walking down the street/And I wanna kill everyone I see"), défaitisme dévasté ("I've lost my mind/I'm losing you/It's just as well"), instinct de révolte, ou plutôt, de survie ("I'm gonna dream up a new dream/And I'm gonna dance to a brand new beat"), avant un constat d'une fatale évidence ("I'm wearing a smile, and it's fake/'Cause right now it has to be/Because I know that love is the only thing/That's gonna save me."). La composition s'illumine surtout dans ce contraste majeur entre des couplets de doo-wop exalté, et cette pause sous forme de deux refrains lors desquels le coeur se brise, l'innocence connaît une fêlure amoureuse désarmante. Une perfect pop-song, indéniablement. Pour conclure, Shimmering Stars offrent une relecture hallucinée du Let It Be Me des Everly Brothers (qui avaient eux-mêmes emprunté à Gilbert Bécaud), où la douceur cède sa place à un bruit presque blanc, à une lumière de fracas et de fascination. Au fond, le scintillement de ces étoiles rappelle sans doute celui de sentiments éternels ...

mercredi 31 août 2011

Playlist #14 : Août, improbabilité.

Les deux mots qui pourraient résumer le mieux ce mois d'Août sont "improbable" et "incroyable". Mais je ne développerai pas plus ...
Pour m'en tenir des préoccupations intéressant ce cher espace d'expression qu'est mon blog, je me souviens le mois dernier avoir teasé sauvagement en parlant de projets, d'évolutions. Pour tout vous dire, je n'ai à l'heure où j'écris ces lignes, rien de plus à vous annoncer de tangible. Mais comme j'avais promis de m'expliquer de manière plus précise, je vous informe que j'ai rempli et mailé un formulaire de candidature à Radio Campus Toulouse, dans l'idée d'un créneau horaire indie-pop qui serait hebdomadairement (peut-être plutôt toutes les deux semaines) concocté par mes soins. Pour le moment donc, aucune nouvelle (rien ne garantit que le retour soit positif, d'ailleurs). Alors stay tuned, si j'ose le jeu de mots.
L'image du mois, c'est A Day For Destroying Things, une annonce pour signaler, il y a 16 ans de ça, la fin de Sarah Records. Cliquez sur l'image pour lire l'intégralité, car ces mots sont inoubliables ... "it reminds us we're alive"


1/ Air France - It Feels Good To Be Around You (sur le single digital It Feels Good To Be Around You, sorti chez Sincerely Yours en 2011)
Air France de retour en plein été, comme une évidence.

2/ Housse De Racket - Aquarium (sur l'album Alesia, sorti chez Kitsuné en 2011)
Ne jamais oublier de se laisser surprendre.

3/ New Order - Temptation (sur l'album Substance, sorti chez Factory Records en 1987)
Oooh ooh ooh ooh ooh ...

4/ Pulp - Babies (sur le single Babies, sorti chez Gift Records en 1992)
Jarvis a toujours de ces histoires dingues à raconter ...

5/ Summer Camp - Better Off Without You (sur l'album Welcome To Condale, à paraître chez Moshi Moshi Records en 2011)
Un tube, tout simplement.

6/ White Town - She's A Lot Like You (sur le single digital She's A Lot Like You, auto-distribué en 2011)
Pop-song malicieuse du mois!

7/ This Many Boyfriends - Young Lovers Go Pop! (sur le single Young Lovers Go Pop!, sorti chez Angular Records en 2011)
Pour crier très fort ce refrain hallucinogène.

8/ The Pains Of Being Pure At Heart - Tomorrow Dies Today (sur le single The Body, sorti chez Slumberland Records en 2011)
Le tourbillon de la vie, comme une pédale de fuzz ...

9/ Teenage Fanclub - Start Again (sur l'album Songs From Northern Britain, sorti chez Creation Records en 1997)
... we've got time to start again.

10/ Jens Lekman - Maple Leaves (live au Konserthuset de Göteborg, le 11 Décembre 2003)
Douceur nordique.

samedi 27 août 2011

Chez Sarah #15 : The Field Mice - Sensitive [SARAH 18]

Que dire pour introduire Sensitive, de The Field Mice ? C'est peut-être la sortie de Sarah Records qui a le plus compté dans la destinée du label. Allez savoir pourquoi (mais une écoute suffit sans doute à comprendre) un single peut bousculer, renverser, emporter l'imaginaire collectif de tout un tas de gens. Oui, parfois, c'est aussi simple que ça, et le réel vient toucher le symbolique, l'oeuvre et l'auditeur ne forment plus qu'un, l'identification est totale. Sensitive, sorti en 18ème position, le 27 Février 1989, restera à tout jamais le single fondamental de Sarah, celui, en tous cas, que nombre d'amoureux de la structure de Bristol garderaient s'il ne devait en subsister qu'un. C'est donc sans doute habité d'une forme de fébrilité que je vous le présente, comme si oser en parler était risquer de mal exprimer tout ce que ces deux chansons gravées sur microsillon représentent pour moi, et probablement pour d'autres. Mais qu'importe, car j'ai envie, si ce n'est besoin, d'en parler. Et ce ne sont pas les mignons pingouins de la pochette qui m'arrêteront ...

Sensitive (=>) donc, sur la face-A. La plus évidente des évidences. Car à l'instant où commencent les arpèges brumeux, au moment où l'on comprend que la boite à rythmes ne s'arrêtera plus, à la seconde où la basse étire le tout, on comprend que quelque chose de spécial est en train de se passer. C'est tout juste avant que la fuzz ne vienne sublimer un coup de vent, ébranler les sentiments. Bobby Wratten commence à chanter. Il est fragile, doux, presque sûr de lui, alors même qu'il exprime le fait même d'être dépassé par le monde, par les autres. C'est là qu'est toute sa force, car Bobby Wratten assume, porte en étendard, écrit un hymne. Un hymne démesurément sensible, parce qu'il ne sait pas vivre autrement, et moi non plus d'ailleurs. "If the sun going down can make me cry./Why should I, Why should I/Why should I not like the way I am ?" et tout semble énoncé. Qui oserait défendre une telle idée, selon laquelle s'émouvoir à en pleurer pourrait aussi constituer une façon d'appréhender sa vie ? Le refrain n'exprimera pas autre chose que cette beauté, pour beaucoup illusoire, pour certains fondamentale. Puis la mélodie fulgurante s'écorche dans une outro à fleur de peau, sans limite, bouleversante et ravagée, dont on aimerait qu'elle dure éternellement, alors que, digues comme retenues, tout semble lâcher ...

Le plus fou dans cette histoire, c'est sans doute que la face-B, When Morning Comes To Town (=>), est tout aussi incroyable. L'atmosphère est à la fois très différente et très semblable à celle de Sensitive : on ressent terriblement ce coeur serré, cette chambre d'étudiant en hiver, chauffée au point de laisser de la buée sur la vitre de la seule fenêtre de la pièce. Les yeux sont plongés dans le vague de cette mélodie délicate, cajoleuse mais brisée, les mots prennent tout leur sens. Il est question d'une rupture, à l'évidence, mais d'une rupture pas comme les autres. Si l'année suivante, End Of The Affair constatera les dégâts, désespérée et résignée, When Morning Comes To Town se glisse dans une vision plus apaisée, fatalement mélancolique, mais ponctuée d'un sourire timide. Au fond, ces deux voix (Nina Handrews s'ajoutant à Bobby Wratten) s'accordent à merveille, et c'est bien là que réside l'immensité du morceau. Oui, les arpèges subliment la lumière de ce jour qui se lève. Oui, le clavier caresse, enveloppe. Oui, la guitare acoustique porte le monde sur ses frêles épaules. Mais ces deux voix disent tout. Tout de cette histoire au destin un peu cruel ("All things have to end/They have to and they do./And they do."), tout de ce qui ne s'effacera jamais ("I'll think of you always/For you know as well as I/That for you I would have/Died and would still die/Would still die."). Puis, surtout, du fait de se quitter avant qu'il ne soit trop tard, avant que la perfection de cet instant ne s'évanouïsse : "This way it is the way no rain of cutting words/I'm happy to go out like this, if happy is the word." Alors, si les larmes coulent, elles ont, plus que le goût de la tristesse, celui de l'émotion la plus pure, et la plus intense.

dimanche 21 août 2011

Hors-sujet #3 : Making a mixtape (for someone).

To me, making a tape is like writing a letter — there's a lot of erasing and rethinking and starting again.

Ces mots, vous pouvez les lire dans High Fidelity, roman culte de Nick Hornby, sorti en 1995. Un livre dans lequel l'anglais plonge dans les petit travers d'un fan de musique qui semble voir sa vie sentimentale influencée par ses pop-songs préférées ... Si j'ai exhumé ces quelques mots, c'est parce que je suis moi-même, à l'instant où j'écris, en train de m'essayer (ce n'est pas tout-à-fait la première fois, quoique c'est peut-être la première fois que ça m'importe autant) à l'art de réaliser une mixtape (pour une personne qui se reconnaîtra). Une idée qui peut sembler complètement hors-sujet à l'heure où l'on s'échange en trois clics des gigaoctets de mp3. Mais pas tant que ça, finalement, car faire une mixtape, c'est d'abord ça : apprendre à choisir. Il est évident que je ne mixe justement pas une "tape" (pour des raisons tout simplement pratiques), mais un CD ... Remarquez, ça revient un peu au même, l'idée importante étant, me semble-t-il, d'être pris dans des limites temporelles, afin d'être contraint de tenter de sublimer un cadre prédéfini. Mon CD, en l'occurrence, me laisse 80 minutes (par comparaison, une cassette audio classique, c'est 60 ou 90 minutes) (et une cassette audio a deux faces, ce qui peut rendre l'exercice encore plus intéressant, mais qu'importe).

"Making a tape is like writing a letter", et l'on pourrait presque s'arrêter là. Car le fait que tout ne soit ensuite qu'erasing and rethinking and starting again semble être une évidence, un peu comme pour toutes les choses dans lesquelles on veut mettre beaucoup de soi-même. Pour revenir à ce qui rapproche la mixtape de la lettre, d'autres éléments de comparaison viennent, inévitablement. Principalement, pour moi, il s'agit de faire passer un message, ou de raconter une histoire. Ecrire une lettre à quelqu'un, c'est mettre une part de soi, une part de la personne destinataire, et sans doute une part du monde autour. Pour la suite, il n'y a de règles narratives que celles que vous souhaitez vous imposer. Questions/réponses, thématique particulière, voyage intersidéral, intimité brûlante, fête démesurée ... la mixtape peut de toute façon servir plus ou moins toutes les causes, de clins d'oeil appuyés en références à peine compréhensibles, de coupures radicales en délicats enchaînements.

Après tout, peu importe les conventions, quand ce qui compte vraiment, c'est d'être personnel, imaginatif, et surtout sincère. De faire découvrir, forcément, sans jamais oublier de s'ouvrir pour découvrir un peu soi-même, ou redécouvrir, parfois. Relire des paroles, ou se laisser abuser par un titre. Chercher l'ambiance qui saurait parfaitement retranscrire un moment, trouver la transition qui va surprendre ou conforter, la mélodie fatale à l'imaginaire, le langage qui pourra être aussi bien compris par la personne qui reçoit que par celle qui suggère et donne. Puis sans se prendre vraiment au sérieux (préparer une mixtape, c'est aussi se faire plaisir, tout simplement), c'est l'occasion de se confier sans doute un peu, de glisser les choses sur lesquelles on a parfois du mal à mettre des mots. Si on peut, forcément, voir là-dedans une jolie bêtise adolescente ("Tu penseras à moi en l'écoutant.", sans doute, mais n'est-ce pas négliger un peu le contenu ?), c'est sans doute surtout l'occasion d'un bouche à oreille intime, en même temps que d'un cadeau dont la valeur symbolique dépasse largement la valeur pécuniaire. Comme si les chansons étaient ce que les amoureux de la pop ont de plus cher à offrir ...

dimanche 14 août 2011

Un single #25 : Beach Fossils - Daydream [2010]

En un peu plus de deux ans, et une centaine de références, le label Captured Tracks s'est fait un nom, et a cristallisé avec force un air du temps indie-pop pour le moins majestueux, remettant au goût du jour des guitares frêles, les rythmiques glacées, ou les voix timides, enregistrées dans les chambres d'étudiants rêveurs. En découvrant des noms comme Wild Nothing ou Craft Spells, mais également en rendant hommage à de glorieux anciens (les re-issues de The Wake sont une idée formidable), la structure de Brooklyn avance avec exigeance, semblant ne se référer qu'à des pop-songs parfaites. Une des sorties les plus abouties est sans doute le tout premier single de Beach Fossils, cet impensable Daydream, venu préfiguer, en Février 2010, la brise exquise de l'été qui suivrait, en même temps qu'il nous démontrait que Dustin Payseur, New-Yorkais lui aussi, et encore artisan solitaire du projet à cet instant, était capable d'intouchables hymnes adolescents.

La face-A est confiée à Daydream. Un morceau mené par une boîte à rythmes absolument rudimentaire qui distille un beat hésitant qui fait ressortir l'amateurisme et la touchante maladresse de l'enregistrement. Pourtant, au dessus, les guitares s'emmêlent, et les arpèges créent une lumière douce et subtile, fondus comme la voix dans une reverb enveloppante, qui dépose comme un voile sensible, semblable à une caresse. Le chant de Dustin Payseur sature à peine, lointain et ébranlé, en des mots bien trouvés autour d'un équilibre entre solitude et romantisme affecté ("I am on time/Though I didn't try/And the seconds move slow/But the moment's all too fast."). Cette rêverie éveillée semble toujours plongée dans la flemme, sans qu'on puisse dire réellement si la mélodie, finalement souriante et éclatante, prend le pas ou non sur une mélancolie diffuse, un oubli qui ne s'éloigne jamais vraiment. Une ambiguïté, une fragilité, dans lesquelles se confient souvent les plus renversantes des pop-songs. Soudaine et dévorante, Daydream rentre inévitablement dans cette catégorie.


Sur la face-B, et Desert Sand (=>), les influences changent, sans pourtant que la façon de faire sonner ne se modifie radicalement. Plutôt que de plonger dans l'imagerie délicate de Sarah Records, ce sont ici une surf-music calme, un peu "lo-fisée", et le psychédélisme en noir et blanc du Velvet Underground, qui mènent le bal. Bienvenue donc dans un monde où la reverb est plus crasseuse que satinée, où le soleil brûle plus qu'il ne câline. La batterie, tellement 60's, est mortellement passive, et les guitares construisent cette fois un feu de paille qui crépite, se consume dans une mélodie défoncée qui bouscule dans une certaine arrogance, cheveux sales au vent, rien à foutre de rien, si ce n'est de cette chaleur écrasante. Il est alors surprenant mais intéressant de trouver encore une voix fatiguée, instinctive, et désabusée. Dans ce (presque) western nocturne, Beach Fossils conclut son premier fait d'arme. Inutile de dire que nous n'avons, depuis, pas été déçus.

dimanche 7 août 2011

Un single #24 : Yuck - Shook Down/Milkshake [2011]

Je ne sais pas vraiment si le cas des anglais de Yuck mérite une introduction biographique, tant le quatuor mené par Daniel Blumberg et Max Bloom (ex-Cajun Dance Party, un sous-sous-sous groupe pop-rock qui rendait dingues les lycéennes anglaises à l'époque où The Kooks vendaient des disques) (oui, je parle comme un vieux con) fait l'actualité depuis ce début d'année 2011 (même avant pour les plus renseignés, fracassés par le single Georgia dès l'été dernier). La sortie en début d'année chez Fat Possum d'un premier album simplement intitulé Yuck leur a ouvert pas mal de portes, ce qui semble plutôt logique dans la mesure où, si le groupe se contente essentiellement de revenir à gros traits de guitares sur ses idoles 90's (Teenage Fanclub, The Stone Roses, Dinosaur Jr., et j'en passe ...), il avance surtout grâce au moteur de chansons d'une terrible évidence, entre la fraîcheur du branleur, et la puissance sentimentale de la jeunesse. Parfait exemple avec le dernier single en date, le double face-A Shook Down/Milkshake, sorti cet été, visiblement auto-distribué, et qui relie un titre présent sur l'album à un inédit du meilleur goût.

Shook Down (=>) est donc la première face-A de ce single, et consiste en une balade d'une facilité déconcertante. Une facilité marquée dès ces arpèges inauguraux délicats, qui dévoilent une mélodie qui peut sembler légère comme une plume, mais cache une mélancolie embrumée. On y plonge les yeux dans le vague, on écoute en rêvassant des mots qui semblent décrire une relation probablement un peu compliquée, faite d'erreurs ("And it's been a week/And it's been a week too long/There are several things that I've been doing wrong.", sur un refrain brisé), et d'instants de doute qu'on ressent intensément ("If it's late, then I will go/Turn the lights out, turn it slow.", image renversante, tandis qu'à peine plus loin, Daniel Blumberg ne peut s'empêcher de lâcher un "Listen girl, I think of you." ravagé). La clarté de la ligne mélodique est bien réelle, mais se trouve pourtant bouleversée quand après un second refrain, la pédale de fuzz est actionnée pour envoler un final lumineux, où les mots s'éprennent cette fois d'un espoir adolescent, d'une envie de serrer fort dans ses bras, alors qu'une guitare soliste se confie, fatale.


Milkshake (=>) est donc présentée comme une autre face-A, et ce n'est sans doute pas usurpé tant la composition mérite bien mieux qu'un statut de face-B. Le son est toujours manifestement 90's, avec ces accords craquants (dans tous les sens du terme), puis ces arpèges qui sonnent comme un printemps électrique. Là encore, le mélange entre coolitude bubblegum et spleen à la douceur fragile rend la mélodie irrésistible, tandis que la voix la voix de Daniel Blumberg se traîne, fatiguée sans doute que tout ne soit pas si simple ("I am sorry I admit that/Admit that what I did was wrong", sur un premier couplet introspectif). Le refrain à suivre est porté par des guitares qui gagnent en puissance, et se délie de manière limpide au détour d'une métaphore bien trouvée, quelque part entre innocence et lassitude ("You're making a milkshake of my mind"). On se glisse alors pour terminer dans un moment de détachement presque total, où des choeurs en chantilly gracieuse surplombent un dessert adorable et sucré. Et comme je vous sais aussi gourmands que moi, je vous imagine bien succomber ...

dimanche 31 juillet 2011

Playlist #13 : Charnière juilletiste

Entre relâchement, bonheurs et confirmations, je ne vais pas me plaindre de mon mois de Juillet. Enfin, on peut toujours râler un peu à cause de la météo, mais ça n'aurait pas grand intérêt, n'est-ce pas? Toujours est-il que l'heure est aussi à quelques projets très intéressants, avec la rentrée en ligne de mire ... Comprenez par là qu'il est possible, notamment (d'autres choses n'ont pas leur place ici), que Chocolate, Love, Sex. s'expose à un peu de nouveauté. Rien n'est pour l'instant ni décidé, ni acté (et puis ce message s'autodétruira peut-être si je continue dans ce seul et même format en Septembre), mais j'ai des idées plein la tête, qui méritent d'être explorées. Je reste volontairement très évasif (l'art du teasing ?), mais je ferai un point sur tout cela fin Août, autrement dit, dans la prochaine playlist.
L'image du mois est un court instant délicieusement passéiste.



1/ Washet Out - Echoes (sur l'album Within And Without, sorti chez Sub Pop Records en 2011)
Pas eu le temps d'en parler, mais j'aime cet album. Vraiment.

2/ Clio - Eyes (sur le single Eyes, sorti chez Airport en 1984)
Dédicacée à mon cher Pogo Moumoute, et à sa passion pour l'italo-disco.

3/ New Order - Age Of Consent (sur l'album Power, Corruption & Lies, sorti chez Factory Records en 1983)
Les filles adorent. Elles ne sont pas les seules.

4/ Seapony - What You See (sur l'album Go With Me, sorti chez Hardly Art en 2011)
Arpèges et douceur.

5/ The Shangri-Las - Remember (Walkin' In The Sand) (sur le single Remember (Walkin' In The Sand), sorti chez Red Bird en 1964)
Ah, la plage ... Pas pour cette année.

6/ Blueboy - Toulouse (sur le single Dirty Mags, sorti chez Sarah Records en 1995)
Juste pour dire que je reste dans la ville rose ...

7/ Peru - Clueless (sur la compilation Across Blue Skies, sortie chez Jigsaw Records en 2010)
Il n'est jamais trop tard.

8/ Teenage Fanclub - Going Places (sur l'album Grand Prix, sorti chez Creation Records en 1995)
Les Fannies, on ne s'en lasse pas.

9/ Felt - Rain Of Crystal Spires (sur l'album Forever Breathes The Lonely Word, sorti chez Creation Records en 1986)
Dédicace à Fabien d'Anorak Records, car l'entendre en parler, c'est quelque chose!

10/ Belle & Sebastian - Another Sunny Day (live à BBC Scotland, probablement en 2006)
You missed my eye I wonder why, please do it again ...

mardi 26 juillet 2011

Chez Sarah #14 : Blueboy - Clearer [SARAH 55]

Blueboy est, et restera, toujours, un groupe à part chez Sarah Records. Un groupe qui a déplacé certaines frontières par son approche de la pop, face la relative homogénéité qui caractérisait son label et son époque, en apportant une palette sonore originale et majestueuse. Blueboy, c'est, aux origines, Keith Girdler et Paul Stewart, deux garçons venus de Reading. Le premier est chanteur, à voix d'ange, de celles dont on se souvient à tout jamais. Le second est guitariste, doué comme pas permis, capable de lignes mélodiques qui dépassent le cadre de la jangle-pop pour embrasser tantôt le jazz, tantôt la bossa-nova. Clare Wadd et Matt Haynes ne résisteront pas à la demo reçue aux environs de 1991, et leur proposeront un premier single chez Sarah. Il s'agit de Clearer, qui sort en Octobre, référence numéro 55, sous une pochette rougeoyante, avec l'impression que la clarté du titre résume à elle seule les deux chansons gravées sur ces sept pouces.

La chanson titre Clearer (=>) développe une indicible perfection dès ses arpèges introductifs, plongés dans un echo glacé. La mélodie qui se dessine est lumineuse, pure, perdue sur des nuages immobiles qu'on croit pouvoir toucher, le temps suspendu. Les accords, acoustiques et soyeux, sont ensuite joués avec la plus absolue douceur, caresse rêveuse, alors que la voix de Keith Girdler nous effleure, sensible et forte à la fois, mêlant délicatesse et assurance. Sans se perdre dans les erreurs du genre, il livre un texte de protest-song qui défend avec pudeur et justesse le combat homosexuel, au nom de l'amour, plus que de toute autre argumentaire ("Don't restrict me, don't restrict me.", ou, plus loin, "So let me live and let me love, I need love so bad."). Le refrain représente une profonde respiration, soulignée par la discrète apparition de la section rythmique. Puis on dépasse des guitares égarées mais splendides, fourmillant de détails mélancoliques, lors d'un pont qui invite à l'introspection. Indéniablement, Clearer fait partie de ces chansons qui mettent à nu les sentiments, évoquant une révolte intime et presque silencieuse, un souffle fragile mais surtout humain, car soulevé par un espoir ineffable.

Sur la face-B, on trouve Alison (=>) (prénom plus tard honoré par Slowdive, mais c'est une autre histoire). La guitare électrique se balade toujours avec légèreté derrière le chant des oiseaux, coulée dans un delay qui convoque les méandres de Vini Reilly (The Durutti Column). La boîte à rythmes minimaliste et pesante vient pourtant apporter un contraste, en juxtaposant une pesante ambiance d'orage d'été. Reste que le virtuose Paul Stewart joue des rayons de soleil pour éclairer la voix cette fois à peine plus hésitante de Keith. Les images subtiles décrites dans son texte sont perceptibles, presque visibles, même si elles sont exprimées dans une élégance irréelle ("Alison, the stars shine down on you/And stars shine through/A night so blue"). Un refrain qui vient balayer ce que l'on imagine possible, tutoyant jusqu'aux étoiles qu'il figure, s'envolant bien plus loin que les limites communément admises ... Blueboy affiche ainsi sa singularité, à l'instant même où débute son éclosion. Bientôt viendra le temps de l'épanouissement.

lundi 18 juillet 2011

Chez Sarah #13 : Action Painting! - These Things Happen [SARAH 28]

Dans un grand moment de théorisation probablement empreint d'une légère d'ironie, Matt Haynes, co-fondateur (avec Clare Wadd) de Sarah Records aurait expliqué que tout label se devait d'avoir un groupe dont le nom contiendrait un point d'exclamation ... Pour ne pas déroger à cette règle, la structure de Bristol accueille donc dès Février 1990 la formation de Brighton Action Painting!, un quatuor mystérieux à la destinée météorique (trois singles chez Sarah, un chez Damaged Goods, et ce sera tout). L'occasion de découvrir Sarah sous le jour nouveau et intéressant de l'influence punk, dont on sait que l'éthique Do It Yourself a eu une importance fondamentale, mais qui parfois a irradié une part du son de certains groupes, en plus de leur vision de la pop-song immédiate, jouée vite et à l'arrache. Ainsi, ce These Things Happen est introduit par quelques mots malicieux qu'on peut lire au dos de la pochette du 45 tours : "Two pop-songs before our instruments bust, amen!"

Sur la face-A, c'est These Things Happen (=>) qui nous accueille avec une (ou plusieurs ?) guitare acoustique qui carillonne, très C86 en ce qu'elle mêle soleil radieux et douceur matinale. La voix du chanteur ne se pose pas, préférant voler très loin au dessus, évoquant la distance et la hauteur qui caractérisent la présence d'un Robert Smith. La ligne mélodique qui mène au refrain est très intéressante, puisque les guitares dansent et tourbillonnent, hésitent un peu, avant finalement de se lancer, relayées par un synthé qui sonne fatalement cheap (disons que la cold-wave s'est égarée là). Ce refrain sonne, malgré ses paroles ambiguës ("So sad to see the way you turn now I said/I never ever see you cry/I never meant a single word that I said/Lie lie lie"), comme un passage enthousiasmant et entraînant, tant le rythme y est soutenu, tant les guitares virevoltent avec légèreté. Des guitares qui laissent un vide à couper le souffle dans un final où synthé et voix se trouvent seuls, pris de vertige. Un dernier éclair, et c'est terminé ...

Côté face-B, Boy Meets World (=>) démarre sur les mêmes bases : des six cordes brûlantes qui cavalent (on pense à The Wedding Present), sur une batterie qui cette fois fleure bon la rythmique punk qui tabasse, tête baissée et grosse envie d'en découdre. Le chant lui-même est bien moins soigné, plus sauvage et déraillant que sur l'autre face. Mais de toute façon, ces "Wake up, wake up!" et autres "Shake up, shake up!" ne peuvent s'exprimer que sous cette forme, non ? La surprise du morceau, c'est d'entendre distinctement la basse, qui par ailleurs porte à elle seule la mélodie. Toujours est-il que l'ensemble, troussé dans un amateurisme rafraîchissant (le pseudo-solo final vire presque au n'importe quoi), peut mettre du haut de ses moins de deux minutes d'urgence ravagée, un joli bordel au fond des chambres des amoureux de Sarah ...

mardi 12 juillet 2011

Live report #10 : Pop & Merguez @ Saint-Jean-Ligoure

Quand le label de Limoges Anorak Records (=>), actif depuis 1992, décide de réunir quelques groupes indie-pop venus d'un peu partout en Europe, et d'organiser, le 9 Juillet, autour de ces derniers, une grande soirée baptisée "Pop & Merguez", on ne peut que toucher au mémorable. Il faut bien dire que l'idée d'un popfest rural est génialement séduisante : la salle des fêtes (et ancienne école) d'un minuscule village (Saint-Jean-Ligoure), un festin pour le moins estival (du vin, des bières, une plancha qui tourne aux légumes, merguez et à l'andouillette, le tout compris dans le prix de la place) dans une cour de récré, de jolies rencontres (oui, c'est le genre d'endroit où on voit enfin "en vrai", et avec un immense plaisir, ses "amis facebook" ... et où on en trouve de nouveaux, et pas des moindres!), le stand de disques Hands&Arms qui fait peur tellement on a envie de tout acheter, six groupes de qualité, une ambiance décontractée et chaleureuse, et une fête qui se poursuit all night long puisque les premiers voisins sont assez loin (enfin, j'espère ...). En résumé, les ingrédients d'un très bon moment, placé sous le signe du partage de notre passion et notre amour de la pop (et des merguez ...). Alors en premier lieu, remerciements à Fabien, Fanou et Guillaume (et tous ceux qui les ont aidés) pour l'ensemble de leur oeuvre (qui va du covoiturage mis en place depuis la gare de Limoges, à leurs qualités d'organisateurs qui ont permis que tout se passe pour le mieux). Les conditions de jeu : salle décorée dans l'esprit du lieu (enfantin!), belle chaleur car le temps est assez lourd, bien que MétéoFrance ait toute la semaine annoncé de la pluie.


Après donc une après-midi et un début de soirée consacrés aux discussions, aux repas, et à l'entame de l'apéritif, ce sont les anglais de Peru (=>) qui ouvrent la soirée. Ce groupe est un vieux projet mené par le gentil et souriant Brian Price, qui avait écrit et enregistré tout un tas de chansons entre 1992 et 1996 (aujourd'hui compilées sur Across Blue Skies, chez Jigsaw Records), et qui reprend aujourd'hui du service (un EP est paru ce lundi), en empruntant quelques membres de The Kick Inside pour l'aider sur scène. Au menu, des pop-songs jangly comme il faut, et cette impression que le temps défile autrement, qu'on est retombés quelque part au début des années 1990. Anciennes et nouvelles compositions se succèdent dans une belle osmose, et dans un doux balancement porté par une guitare électrique alerte, et la voix timide de Brian Price. La superbe Clueless (=>) terminera ce set qui aura eu le mérite de bien nous mettre dans le bain : ici, l'indie-pop est reine, et il ne peut pleuvoir que des mélodies!


Venaient ensuite The Lost Homeboys (=>), débarqués de Goteborg. Cinq garçons qui jouent une musique retraçant la timidité et les images désabusées de Sarah Records. Souvent agrémentées d'un discret glockenspiel, ou d'un clavier épuisé, leurs chansons viennent immédiatement frapper en plein coeur, secouer les sentiments par leur douce mélancolie. Difficile donc de ne pas être touché par les saveurs nocturnes et nordiques propagées par leur son, superbement enrichi par la guitare acoustique à douze cordes du chanteur Gustaf Murman. On pense à tous ces groupes, de The Sweetest Ache à Brighter, qui naviguent dans une gêne et une indécision impressionnistes, préférant peindre leurs mélodies par petites touches, qui reliées donnent vie à de beaux tableaux. Et pas question de reprocher un manque de rythme : ces chansons se savourent avec délicatesse.


L'instant norvégien à suivre est surtout un instant twee, puisque c'est le trio de Bergen Soda Fountain Rag (=>) qui prend possession de la scène. La configuration est originale, puisque le très jolie Ragnhild joue de la batterie debout tout en chantant, quand elle ne prend pas quelque secondes pour user d'un mélodica. Les chansons sont fraîches, décomplexées, sautillantes, bref, il n'en faut pas plus pour que la salle entame des pas de danse convaincus et frétillants. D'autant que le groupe est en terrain conquis, puisque c'est Anorak Records qui avait édité en 2006 leur premier EP, Qui a besoin d'une voiture ?. Au bonheur de déguster ces hits de poche (Are Philosophers Lonely ? (=>), Go Bus Baby Go (=>) avec son synthé cheap mais ravageur, et puis toutes celles que je connaissais pas mais qui m'ont embarqué sans problème dans leur douce folie), s'ajoute donc pour beaucoup une petite valeur sentimentale, qui va rendre leur set résolument plaisant. On ne compte donc plus les sourires côté spectateurs, ni d'ailleurs les ballons de baudruche et les bulles de savon qui parcourent la salle, plongée dans une ambiance sucrée et enfantine. Une salle qui n'hésitera pas à réclamer et obtenir le premier rappel de la soirée.


Et on enchaîne dans l'énergie réjouissante avec les très sympathiques The Wendy Darlings (=>), nationaux de ce popfest puisqu'ils avaient fait le route depuis Clermont-Ferrand. La formation, à l'origine constituée en trio, accueillait deux membres de plus chargés respectivement des choeurs et d'une seconde guitare, donnant à leur son une épaisseur supplémentaire sans le moins du monde amputer cette dynamique foutraque qui les caractérise. Il faut dire que le groupe joue une musique rutilante, à la croisée des chemins entre indie-pop (pour l'aisance mélodique), garage (pour le punch et la vigueur), et le punk (pour la simplicité et l'efficacité). Largement de quoi retourner littéralement une salle qui saute dans tous les sens, au son de compositions jouissives (Enormous Pop (=>), grand moment de craquage). Le plaisir semble être partagé par les cinq, qui bougent bien sur scène, rendant immédiatement communicative leur bonne humeur. Après une reprise de The Pastels pour conclure, ils sont fort logiquement conviés à effectuer un rappel mené tambour battant. Ces gens sont tellement forts qu'ils ne devraient pas avoir beaucoup de mal à convaincre le public britannique à l'indietracks, fin Juillet.


Puis c'est au tour de The Kick Inside (=>) (from Bristol, patrie d'un label indie-pop bien connu ...) d'entrer en scène, certains membres pour la seconde fois de la soirée. La principale attraction du groupe est la présence de Thomas, guitariste surdoué dont le jeu rappelle inévitablement Johnny Marr, dans cette capacité qu'avait le mélodiste de The Smiths d'enchaîner des arpèges à une vitesse vertigineuse, et des accords dont il avait seul le secret. C'est Don't Take This To Heart qui ouvre le set de façon réellement accrocheuse, mais en pointant aussi, à mon sens, la limite du groupe, qui réside dans le chanteur Sean, qui peine un peu à donner aux chansons la dimension qu'elles mériteraient. Reste tout-de-même qu'on passe un super moment à remuer, et surtout, qu'un concert comme celui-là donne une furieuse envie de jouer de la guitare! Et rien que pour ça ...


Pour finir, ce sont les cinq écossais de Wake The President (=>) qui sont attendus. Sans entrer dans les détails, je ne vous cache pas qu'ils se sont montrés parfois un peu ingérables, que ce soit en arrivant très en retard (ce qui les privera d'un soundcheck), ou en se bourrant la gueule magistralement toute la soirée. C'est d'ailleurs sur un "We are Wake The President, we are drunk" que le set est lancé par le chanteur Erik Sandberg. Un set tendu et urgent, réduit au minimum, où la communication avec le public va s'avérer un peu difficile (le contraste étant d'autant plus marqué qu'on s'est sentis très proches des autres groupes toute la journée et la soirée). Et c'est un peu dommage que l'ingrédient affectif manque, car ces gamins traînent des chanson absolument incroyables, perdues entre Orange Juice et le mouvement C86, mélodies d'un classicisme fou mises en avant, qu'elles soient issues de leur nouvel album, ou du précédent, comme en atteste leur intouchable single Miss Tierney (=>), qui fermera avec succès leur prestation.
La suite de la soirée appartient indéniablement à l'histoire, tant le duo Joanny/Rosa aura animé avec brio les platines de la salle (enfin, sur un Mac, d'abord via la sono officielle, puis grâce à un ampli guitare de fortune, mais rien ne pouvait nous arrêter) jusqu'au bout de la nuit. Les popkids que nous sommes (car même les un peu moins jeunes sont des popkids dans leur tête!) auront été gâtés par ce combo-DJ capable de choix pointus, mais aussi d'accompagner d'improbables délires (les FriendsOfPop en slip, le ping-pong improvisé, nos ridicules façons de danser ...), de Crush The Flowers à Age Of Consent, de Take On Me à Sensitive, de Young Adult Friction à Vamos A La Playa (?!), de La Revolition Sexual à Rain Of Crystal Spires. Alors qu'importe les heures de train, qu'importe les taux d'alcoolémie, qu'importe la fatigue du lendemain, car ce 9 Juillet était tout simplement magique.
PS : photos empruntées à Fanou aka Skittle Alley, et à Richard Hargrave. Merci à eux!
 
 
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