mardi 12 juillet 2011

Live report #10 : Pop & Merguez @ Saint-Jean-Ligoure

Quand le label de Limoges Anorak Records (=>), actif depuis 1992, décide de réunir quelques groupes indie-pop venus d'un peu partout en Europe, et d'organiser, le 9 Juillet, autour de ces derniers, une grande soirée baptisée "Pop & Merguez", on ne peut que toucher au mémorable. Il faut bien dire que l'idée d'un popfest rural est génialement séduisante : la salle des fêtes (et ancienne école) d'un minuscule village (Saint-Jean-Ligoure), un festin pour le moins estival (du vin, des bières, une plancha qui tourne aux légumes, merguez et à l'andouillette, le tout compris dans le prix de la place) dans une cour de récré, de jolies rencontres (oui, c'est le genre d'endroit où on voit enfin "en vrai", et avec un immense plaisir, ses "amis facebook" ... et où on en trouve de nouveaux, et pas des moindres!), le stand de disques Hands&Arms qui fait peur tellement on a envie de tout acheter, six groupes de qualité, une ambiance décontractée et chaleureuse, et une fête qui se poursuit all night long puisque les premiers voisins sont assez loin (enfin, j'espère ...). En résumé, les ingrédients d'un très bon moment, placé sous le signe du partage de notre passion et notre amour de la pop (et des merguez ...). Alors en premier lieu, remerciements à Fabien, Fanou et Guillaume (et tous ceux qui les ont aidés) pour l'ensemble de leur oeuvre (qui va du covoiturage mis en place depuis la gare de Limoges, à leurs qualités d'organisateurs qui ont permis que tout se passe pour le mieux). Les conditions de jeu : salle décorée dans l'esprit du lieu (enfantin!), belle chaleur car le temps est assez lourd, bien que MétéoFrance ait toute la semaine annoncé de la pluie.


Après donc une après-midi et un début de soirée consacrés aux discussions, aux repas, et à l'entame de l'apéritif, ce sont les anglais de Peru (=>) qui ouvrent la soirée. Ce groupe est un vieux projet mené par le gentil et souriant Brian Price, qui avait écrit et enregistré tout un tas de chansons entre 1992 et 1996 (aujourd'hui compilées sur Across Blue Skies, chez Jigsaw Records), et qui reprend aujourd'hui du service (un EP est paru ce lundi), en empruntant quelques membres de The Kick Inside pour l'aider sur scène. Au menu, des pop-songs jangly comme il faut, et cette impression que le temps défile autrement, qu'on est retombés quelque part au début des années 1990. Anciennes et nouvelles compositions se succèdent dans une belle osmose, et dans un doux balancement porté par une guitare électrique alerte, et la voix timide de Brian Price. La superbe Clueless (=>) terminera ce set qui aura eu le mérite de bien nous mettre dans le bain : ici, l'indie-pop est reine, et il ne peut pleuvoir que des mélodies!


Venaient ensuite The Lost Homeboys (=>), débarqués de Goteborg. Cinq garçons qui jouent une musique retraçant la timidité et les images désabusées de Sarah Records. Souvent agrémentées d'un discret glockenspiel, ou d'un clavier épuisé, leurs chansons viennent immédiatement frapper en plein coeur, secouer les sentiments par leur douce mélancolie. Difficile donc de ne pas être touché par les saveurs nocturnes et nordiques propagées par leur son, superbement enrichi par la guitare acoustique à douze cordes du chanteur Gustaf Murman. On pense à tous ces groupes, de The Sweetest Ache à Brighter, qui naviguent dans une gêne et une indécision impressionnistes, préférant peindre leurs mélodies par petites touches, qui reliées donnent vie à de beaux tableaux. Et pas question de reprocher un manque de rythme : ces chansons se savourent avec délicatesse.


L'instant norvégien à suivre est surtout un instant twee, puisque c'est le trio de Bergen Soda Fountain Rag (=>) qui prend possession de la scène. La configuration est originale, puisque le très jolie Ragnhild joue de la batterie debout tout en chantant, quand elle ne prend pas quelque secondes pour user d'un mélodica. Les chansons sont fraîches, décomplexées, sautillantes, bref, il n'en faut pas plus pour que la salle entame des pas de danse convaincus et frétillants. D'autant que le groupe est en terrain conquis, puisque c'est Anorak Records qui avait édité en 2006 leur premier EP, Qui a besoin d'une voiture ?. Au bonheur de déguster ces hits de poche (Are Philosophers Lonely ? (=>), Go Bus Baby Go (=>) avec son synthé cheap mais ravageur, et puis toutes celles que je connaissais pas mais qui m'ont embarqué sans problème dans leur douce folie), s'ajoute donc pour beaucoup une petite valeur sentimentale, qui va rendre leur set résolument plaisant. On ne compte donc plus les sourires côté spectateurs, ni d'ailleurs les ballons de baudruche et les bulles de savon qui parcourent la salle, plongée dans une ambiance sucrée et enfantine. Une salle qui n'hésitera pas à réclamer et obtenir le premier rappel de la soirée.


Et on enchaîne dans l'énergie réjouissante avec les très sympathiques The Wendy Darlings (=>), nationaux de ce popfest puisqu'ils avaient fait le route depuis Clermont-Ferrand. La formation, à l'origine constituée en trio, accueillait deux membres de plus chargés respectivement des choeurs et d'une seconde guitare, donnant à leur son une épaisseur supplémentaire sans le moins du monde amputer cette dynamique foutraque qui les caractérise. Il faut dire que le groupe joue une musique rutilante, à la croisée des chemins entre indie-pop (pour l'aisance mélodique), garage (pour le punch et la vigueur), et le punk (pour la simplicité et l'efficacité). Largement de quoi retourner littéralement une salle qui saute dans tous les sens, au son de compositions jouissives (Enormous Pop (=>), grand moment de craquage). Le plaisir semble être partagé par les cinq, qui bougent bien sur scène, rendant immédiatement communicative leur bonne humeur. Après une reprise de The Pastels pour conclure, ils sont fort logiquement conviés à effectuer un rappel mené tambour battant. Ces gens sont tellement forts qu'ils ne devraient pas avoir beaucoup de mal à convaincre le public britannique à l'indietracks, fin Juillet.


Puis c'est au tour de The Kick Inside (=>) (from Bristol, patrie d'un label indie-pop bien connu ...) d'entrer en scène, certains membres pour la seconde fois de la soirée. La principale attraction du groupe est la présence de Thomas, guitariste surdoué dont le jeu rappelle inévitablement Johnny Marr, dans cette capacité qu'avait le mélodiste de The Smiths d'enchaîner des arpèges à une vitesse vertigineuse, et des accords dont il avait seul le secret. C'est Don't Take This To Heart qui ouvre le set de façon réellement accrocheuse, mais en pointant aussi, à mon sens, la limite du groupe, qui réside dans le chanteur Sean, qui peine un peu à donner aux chansons la dimension qu'elles mériteraient. Reste tout-de-même qu'on passe un super moment à remuer, et surtout, qu'un concert comme celui-là donne une furieuse envie de jouer de la guitare! Et rien que pour ça ...


Pour finir, ce sont les cinq écossais de Wake The President (=>) qui sont attendus. Sans entrer dans les détails, je ne vous cache pas qu'ils se sont montrés parfois un peu ingérables, que ce soit en arrivant très en retard (ce qui les privera d'un soundcheck), ou en se bourrant la gueule magistralement toute la soirée. C'est d'ailleurs sur un "We are Wake The President, we are drunk" que le set est lancé par le chanteur Erik Sandberg. Un set tendu et urgent, réduit au minimum, où la communication avec le public va s'avérer un peu difficile (le contraste étant d'autant plus marqué qu'on s'est sentis très proches des autres groupes toute la journée et la soirée). Et c'est un peu dommage que l'ingrédient affectif manque, car ces gamins traînent des chanson absolument incroyables, perdues entre Orange Juice et le mouvement C86, mélodies d'un classicisme fou mises en avant, qu'elles soient issues de leur nouvel album, ou du précédent, comme en atteste leur intouchable single Miss Tierney (=>), qui fermera avec succès leur prestation.
La suite de la soirée appartient indéniablement à l'histoire, tant le duo Joanny/Rosa aura animé avec brio les platines de la salle (enfin, sur un Mac, d'abord via la sono officielle, puis grâce à un ampli guitare de fortune, mais rien ne pouvait nous arrêter) jusqu'au bout de la nuit. Les popkids que nous sommes (car même les un peu moins jeunes sont des popkids dans leur tête!) auront été gâtés par ce combo-DJ capable de choix pointus, mais aussi d'accompagner d'improbables délires (les FriendsOfPop en slip, le ping-pong improvisé, nos ridicules façons de danser ...), de Crush The Flowers à Age Of Consent, de Take On Me à Sensitive, de Young Adult Friction à Vamos A La Playa (?!), de La Revolition Sexual à Rain Of Crystal Spires. Alors qu'importe les heures de train, qu'importe les taux d'alcoolémie, qu'importe la fatigue du lendemain, car ce 9 Juillet était tout simplement magique.
PS : photos empruntées à Fanou aka Skittle Alley, et à Richard Hargrave. Merci à eux!

2 commentaires:

Pitseleh a dit…

Superbe review à laquelle je souscris totalement. Concerts préférés pour ma pomme : Soda Fountain Rag (magique), Peru (très belle découverte) et The Wendy Darlings qui avaient une belle énergie. J'ai un peu beaucoup raté The Kick Inside...

Yves handsandarms a dit…

Non seulement d'accord sur tout, mais aussi plus clair et exhaustif que mon ressenti lui-même.

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