vendredi 31 décembre 2010

Playlist #6 : The December Sound

Pas trouvé mieux que le groupe de shoegaze bostonien pour donner son nom au titre ce mois de Décembre, passé à beaucoup réviser, à souvent avoir froid, à parfois boire un peu trop, et à fêter comme les traditions l'exigent. Une ambiance qui pousse, allez savoir pourquoi, à se réfugier dans le shoegaze le plus brumeux et enveloppant, et autres pop-songs qui incitent plutôt à rester chez soi. Malgré la date du post, ce ne sera donc probablement pas la playlist de votre soirée de réveillon, mais plutôt celle du lendemain matin ... L'image du mois, c'est une vue de Stockholm, en prévision d'un road trip qui s'annonce magique, au mois de Juin (et ça va être long d'attendre).


1/ Teenage Fanclub - Sometimes I Don't Need To Believe In Anything (sur l'album Shadows, sorti chez Pema en 2010)
En mode "daydreaming" ...

2/ The Harvest Ministers - Six O'Clock Is Rosary (sur le single Six O'Clock Is Rosary, sorti chez Sarah Records en 1992)
Déluge de cordes, et de beauté.

3/ Beach House - Norway (sur l'album Teen Dream, sorti chez Bella Union en 2010)
Bon, mes billets d'avion sont direction la Suède, mais c'est pas grave, la Norvège c'est joli aussi.

4/ Allo Darlin' - My Heart Is A Drummer (sur l'album Allo Darlin', sorti chez Fortuna Pop! Records en 2010)
Petite exception dansante (et génial clip en carton, au sens propre).

5/ The Ropers - Waiting (sur le single Sunbathe, sorti chez Slumberland Records en 1993)
Paroles incompréhensibles, bonheur indescriptible.

6/ Secret Shine - Loveblind (sur le single Loveblind, sorti chez Sarah Records en 1993)
Le bruit court.

7/ The December Sound - Truth Hurts (sur l'album Silver Album, auto-distribué en 2008)
Tempête de neige à l'horizon ...

8/ Jeniferever - From Across The Sea (sur l'album Choose A Bright Morning, sorti chez Drowned In Sound Recordings en 2006)
... et tempête de sentiments, aussi.

9/ Ask For Joy - Swoon (sur l'EP Swoon, sorti chez Infinitely Recursive Records en 2005)
"If the stars had a sound it would sound like this", comme on dit chez Mogwai.

10/ M83 - Kim & Jessie (live pour Pitchfork.tv au Juan's Basement, en 2008)
Nappes synthétiques, composition lumineuse, et solo orgasmique en conclusion ...

mardi 28 décembre 2010

Un single #14 : Fitness Forever - Mondo Fitness EP [2010]

Le truc sympa avec ce qu'on a tendance à appeler "l'internationale indie-pop", c'est qu'on peut y situer des pays pas forcément reconnus pour leur scène musicale. L'Italie est un bel exemple, tant on peine à citer des groupes qui en seraient originaires. Mais il y a des activistes un peu partout, au premier rang desquels le napolitain Carlos Velderrama (sacrée référence footballistique), garçon participant à d'innombrables projets, et qui a réuni avec lui "Big Tony" Fresa (aux claviers), Scialdone (à la basse, ou la guitare), et la jolie brune Paster (au chant) pour fonder Fitness Forever. Ce sont les espagnols d'Elefant Records (vive l'Europe) qui vont les sauver de l'anonymat, en publiant en 2009 leur premier album, Personal Train, puis en 2010, ce single, Mondo Fitness (pourtant enregistré depuis 2007). Chargés d'influences 60's, ils délivrent une sunshine pop irrésistible, témoin d'une Italie idéalisée, et ensoleillée. De quoi, en plein hiver, déconnecter un peu de la neige et du verglas ...


La face-A nous amène donc du côté du Mondo Fitness. Batterie coquine, cuivres malicieux, la chanson démarre sans tarder avec un couplet au chant souriant, qui assume son côté kitsh (comme le clip totalement improbable d'ailleurs). Mais le plus important, c'est que l'ensemble donne une folle envie de sauter partout, de manger des glaces au bord de la plage, et d'avoir des lunettes de soleil ridicules. Et même quand les violons débarquent pour soutenir un refrain à la mélodie doucement sucrée, ça sonne plus joyeux qu'autre chose, avec une montée éclatante en prime. On peut aussi profiter de la discrète guitare électrique qui éclaire les couplets, et de nombreux autres détails tant la production est absolument parfaite (et à ce sujet, je conseille d'aller plus loin que le clip ci-dessus, dont la qualité de l'encodage sonore ne rend pas complètement justice à la chanson). Un groupe, et une chanson, loin d'être prétentieux, loin d'être sérieux, mais plaisants au possible.

On serait presque surpris par le caractère quasi-tragique des cordes qui ouvrent la face-B, Diego Mon Amour (=>). Mais elles se trouvent bien vite intégrées à un balancement très bossa-nova du plus bel effet. C'est tout d'un coup le Brésil d'Edu Lobo qui remplace l'Italie, et ce malgré des paroles, en français dans le texte, auxquelles on ne comprend rien (si ce n'est "les Champs Elysées" et "les bateaux mouches"). Toujours est-il que les arrangements sont aussi voluptueux que somptueux, et qu'on goûte à une vraie sensualité, image à peine jaunie mais délicieuse d'un temps révolu. La mélodie s'impose lentement pour devenir entêtante, et à nouveau, une foule de détails infimes (tourbillons de violons, interventions d'une flûte distraite, choeurs épurés ...) rendent la composition ravageuse. De quoi se déhancher un peu, tout en légèreté, en attendant les beaux jours ...

vendredi 24 décembre 2010

Chez Sarah #7 : The Sweetest Ache - If I Could Shine [SARAH 36]

Je vais vous l'avouer, j'ai bien peu d'éléments pour vous présenter The Sweetest Ache (dont le seul nom pourrait d'ailleurs être à lui seul un résumé parfait de l'esprit du label). Comme un bon nombre de formations signées chez Sarah Records, les gallois furent plutôt discrets, et ont connu une existence pour le moins écourtée (à peine plus de 3 ans). Tout juste le temps de laisser trois singles et un album à Bristol, avant de passer par Sunday Records et Watercolour (pas non plus des labels monstres, c'est le moins qu'on puisse dire). Le premier élément de cette maigre discographie était ce If I Could Shine, sorti chez Sarah à l'automne 1990. Les six garçons dévoilaient, derrière un artwork très Smithien, une musique vaporeuse entre indie-pop et shoegazing, d'une pâleur sensible.

La face-A consiste donc en If I Could Shine (=>). L'atmosphère s'impose, dès le départ : les arpèges forment un épais brouillard, la batterie s'entend à peine, la basse s'étale dans une mélodie flottante et majestueuse. Cette langueur va demeurer tout au long du morceau, comme pour nous glisser dans une paresse contemplative, une inertie mélangeant magie et désespoir. Et l'entrée de la voix, douce et effacée, de Simon Court, va encore un peu plus marquer ces impressions. Il chante, comme fatigué, des mots qu'on peine à déchiffrer ("I saw you standing by the sea ...", ouverture au symbolisme poignant). Alors, les yeux mi-clos, on imagine, on se raconte une histoire un peu triste, mais fondamentalement belle. Puis on l'écoute s'élever un peu pour porter ce qui ressemble à un refrain, dépassant tout juste la tête, et suggérant dans ses paroles une douleur profonde ("If I could be the one to make you smile ..."). Et la composition de se poursuivre dans un final instrumental toujours aussi perdu, où les guitares avancent sans autre but que de s'épuiser à pleurer. Magnifique.

Côté B, on trouve Here Comes The Ocean (=>), qui s'aventure sur les terres de Ride (Andy Bell était lui aussi gallois, après tout), ou de Galaxie 500. Au bout d'une intro assez courte mais menée dans un joli fracas, Simon Court se trouve seul avec la basse de Dave Walters. Le chant exprime à la fois la force d'oser se tenir debout, et la fragilité inhérente à sa solitude. Tout se joue autour du contraste entre les "Under the water, under the sea.", lachés comme on se laisse tomber sur son lit, et les refrains instrumentaux qui évoquent une tempête de sentiments, de vagues incontrôlables, dans lesquelles une des guitares éclate dans un solo damné, en complète perdition. C'est dans ce soulèvement que la composition devient irrésistible, qu'une mélodie se sublime, et, comme souvent chez Sarah, que les choses prennent, indéniablement, du sens.

samedi 18 décembre 2010

Out This Week #7 : The Pains Of Being Pure At Heart - Heart In Your Heartbreak

Les coeurs purs ont tout juste eu le temps de nous manquer. Alors qu'on ne se lassait toujours pas de la sucrerie estivale Say No To Love, alors que leur premier album éponyme, pourtant maintes fois écouté, refuse toujours de céder sa place sur les platines, voila donc le quatuor New-Yorkais engagé dans l'aventure du second album, Belong, qui sortira en Mars, toujours chez le très respectable maison Slumberland Records. D'ici là, pour ouvrir le bal, ils nous envoient en éclaireur ce single intitulé (tout un programme) Heart In Your Heartbreak. L'occasion de s'apercevoir que The Pains Of Being Pure At Heart ont découvert le travail avec un producteur, donc ont quelque peu vu les lignes de leur son bouger. Mais côté compositions, on retrouve bien vite les ingrédients qui les ont portés jusqu'ici ...

L'introduction de Heart In Your Heartbreak (=>) dévoile un exemple parfait de cette évolution. Oubliée la fuzz crémeuse dont on se délectait jusque là, c'est la section rythmique qui porte la chanson, et de façon plutôt musclée. Ceci dit, les fondamentaux qui portent habituellement la musique des Pains ne sont pas laissés de côté : on entend quelques arpèges délicats, et la voix superbement timide de Kip Berman évoque une rupture fatale, dans une mélodie ravageuse. Le refrain déboule ensuite en coupant le souffle. On goûte à ce sentiment si particulier, l'envie de danser tout en chantant des paroles fondamentalement tristes ("She was a tear in a rainstorm", ligne d'une évidence terrible). Le solo de guitare, coquin, joue à s'avancer puis s'arrêter, comme pris de convulsions. Suit un pont à l'émotion palpable, toujours la voix de Kip en étendard, dans une montée qui débouche sur un silence fatal, puis un dernier refrain comme une envolée, pour ne rien oublier de dire, pour laisser le synthé s'échapper, la mélodie s'épanouïr, les sentiments se déverser ...

La face-b est confiée à The One (=>), bombinette indie-pop sucrée comme pas permis. En plus de s'appuyer sur la section rythmique, on trouve une guitare soliste vraiment inhabituelle, mais qui prend en main une mélodie au coeur brisé. La voix de Kip est noyée d'effets qui la rendent fragile et perdue, et l'on se balade avec lui dans une chanson faite d'un amour démesuré, d'une fêlure magnifiée par un ton doucement acidulé. Comme toujours avec les Pains, cette ambiguïté délicieuse se dégage d'une composition qui ne choisit jamais son camp, mêlant toujours à l'excitation souriante une pointe de tristesse et de nostalgie. Le charme fou opère dans ces couplets qui coulent trop vite, ces refrains qui lèvent les yeux vers les étoiles, ou encore ce pont désarmant de simplicité. The Pains Of Being Pure At Heart sont donc toujours particulièrement en forme, à l'approche de leur second album. Et rien qu'à voir le niveau des chansons qu'ils posent en face-b, les espoirs les plus fous semblent permis ...

dimanche 12 décembre 2010

Un single #13 : Wild Nothing - Summer Holiday [2009]

Il s'est passé bien des choses en un an. Demandez à Jack Tatum : fin 2009, il sort son premier single, ce Summer Holiday, chez Captured Tracks. Sans probablement s'attendre à ce qui va suivre. Car le garçon, qui a tout bidouillé seul chez lui, tombe à pic pour séduire tout ce que la toile a de fans d'indie-pop. L'album Gemini, sorti au printemps, ne fera que confirmer les dispositions de ce jeune venu d'un trou perdu de Virginie dans l'art de composer ça et là des chansons marquantes, fatales. Et alors qu'aujourd'hui, il squatte pas mal de tops de fin d'année (c'est la saison), ça méritait bien un coup d'oeil dans le rétroviseur : elles étaient comment, déjà, ces vacances d'été ?


Et bien, elles commençaient par des accords lâchés avec excitation. Des accords qui créent une mélodie impossible, à la beauté lumineuse. La batterie rentre elle aussi en courant, tête en l'air et cheveux au vent, sans plus se soucier que ça du lendemain (quel lendemain ?). La voix, par contre, est un peu plus du genre contemplative. Elle s'attarde un peu, se pose des questions, accélère soudain, mais pas franchement, et toujours dans un détachement délicieux. Le temps d'un refrain sans paroles, on peut se laisser aller à fredonner une exalatation passagère. Plus loin, on s'aventure sur un pont magistral : arpèges éclatants entrecoupés d'accords épurés, break de batterie sur lequel on peut danser timidement, et qui débouche sur une ligne de basse élastique et libérée. Magistral. Et autant le dire, dans votre vol pour très loin, dans le train pour ailleurs, ou même encore sur l'autoroute vers n'importe où, et puis même en restant chez soi pour trainer dans le quartier les soirs où il fait trop chaud, on tient là une composition tout simplement parfaite, qui traine cette mélancolie qui rend certains étés inoubliables.

Retourner le 7' permet ensuite d'embarquer dans Vultures Like Lovers (=>). Le paysage y est sublime, tout autant que déroutant : une guitare éclatée comme un ciel étoilé par un delay halluciné, un beat tremblant, épuisé. Si la voix semble peiner à se faire une place, elle souligne surtout la fragilité de l'ensemble, sorte de miracle permanent, à la touchante précarité. La mélodie ondule, se courbe, la lumière perce parfois au milieu d'un brouillard enveloppant. La limite entre intime et infini se trouble terriblement, les perspectives se brouillent, les répères s'éparpillent. Quels sentiments sont ici exprimés ? Qu'importe, serais-je tenté de répondre : chacun peut trouver là ce qu'il ressent, et s'approprier véritablement la composition, ces images floues, mais simplement belles. Quant à la suite de l'histoire de Jack Tatum, vous la connaissez sans doute aussi bien que moi.

lundi 6 décembre 2010

Un single #12 : Camera Obscura - Eighties Fan [2001]

Camera Obscura est, indéniablement, un de mes sujets de prédilection. J'ai été touché dès la première écoute par le groupe de Glasgow : je ne sais pas trop s'il s'agissait des compositions, touchantes et amoureuses, de ce son empreint d'un classicisme d'un autre temps, ou peut-être plus simplement de la voix de Tracyanne Campbell, hégérie indie-pop impensable, réservée mais magnifique. Bref, je pourrais en parler longtemps, donc, je l'ai d'ailleurs déjà fait. Mais Camera Obscura, j'y reviens régulièrement, sans même avoir besoin d'un motif. Parfois, je reprends tout au début, parfois j'enclenche par la fin, ou je prends les choses en cours. Qu'importe, j'ai posé cette fois-ci mes oreilles sur leur troisième single, le désormais culte Eighties Fan, sorti chez Andmoresound Records en 2001. C'était avant même que ne sorte le LP Biggest Bluest Hi-Fi, et cela restera comme le seul single à en être extrait. Et c'était bien.


Eighties Fan occupe donc la face-A, et s'ouvre dans un clin d'oeil appuyé aux Mary Chain (ou à Phil Spector ?), avec l'utilisation du beat de Be My Baby des Ronettes. Mais pas de guitare stridente à l'horizon : seulement Tracyanne Campbell, quasiment a capella, tout juste soutenue par une basse minimaliste. Les paroles sont malicieuses, et l'amosphère reste un peu suspendue jusqu'à l'arrivée de la guitare acoustique sur le refrain. Les choses se mettent en place doucement, un peu comme si la chanson se réveillait lentement. Pourtant, après le second refrain, une pluie de cordes soulève le morceau, soulignant superbement la mélodie. On ne s'en remettra pas, tant le romantisme et la classe transpirent de cette envolée digne des grands moments de Belle & Sebastian (l'affiliation entre les deux groupes est à l'époque évidente). C'est dans un sourire timide que Tracyanne conclut par des "I'm gonna tell you something good about yourself./I'll say it now and I'll never say it about no one else.", tandis qu'on se délecte encore quelques secondes d'arrangements subtils et délicats.

Sur la face-B, on trouve deux sucreries délicieusement twee-pop. La première se nomme Shine Like A New Pin (=>), qui fait d'emblée sautiller. On fait ici sans les violons, mais le synthé, discret et mélodieux, remplit son rôle à merveille. Tracyanne y chante de son naturel un peu effacé, sans jamais forcer, comme dans un murmure à peine élevé. Sa mélodie vocale est ensoleillée, et le soutien des choeurs de John Henderson apporte une profondeur intéressante. On se laisse aller à perdre un peu la raison sur un pont long mais justifié, pendant lequel s'invite notamment une guitare électrique intense. Puis on glisse vers un final plaisant et relaché, qui coule un peu comme quand on a pas envie que le morceau finisse parce qu'on danse avec une jolie fille ... Let's Go Bowling (=>), elle, est bien plus mélancolique. Habillée d'une acoustique intimiste, on y ressent assez bien l'ambiance de chambre d'étudiant un matin pluvieux, de ceux qui font se demander où vont les choses, et les relations avec les autres (ce qui semble être le thème évoqué). La guitare est chaleureuse, et semble être jouée avec une forme de paresse ... qui la rend irrésistible. Encore une fois, Tracyanne éblouit le morceau en chuchotant, accentuant ainsi la sublime fragilité d'une composition tendrement nostalgique. En connaisseur, John Peel ne s'y était pas trompé : dès cette époque, Camera Obscura avait un bel avenir.
 
 
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