lundi 26 juillet 2010

Un album #4 : Klaus&Kinski - Tu Hoguera Està Ardiendo [2008]

Pas facile de décrire en quelques mots la musique des espagnols de Klaus&Kinski. Impossible même, tant ce groupe, qu'on classera par flemme dans la case indie-pop, manie une forme d'éclectisme, en restant pourtant parfaitement cohérent. Car le quatuor Murciano (Marina Gòmez au chant, Alejandro Martìnez Moya à la guitare, Paco Martìnez Tomàs à la basse, et Alejandro Vicente-Yagüe au reste) navigue avec finesse entre des influences diverses et variées : le baroque de l'emprunt, comme nom de groupe, du patronyme de l'acteur le plus mentalement atteint de l'histoire du cinéma mondial, les facettes de leur Espagne, entre tradition flamenca et étendues baignées de soleil, et la filiation vers l'indie-pop britannique des plus belles années, mais aussi de ses racines pop-60's. Un cocktail bien curieux, pourtant particulièrement réussi sur leur premier essai, Tu Hoguera Està Ardiendo.

Tous ces ingrédients apparaissent dès El Cristo Del Perdòn (=>) (ne vous fiez pas aux noms de certaines chansons, je pense vraiment pas que ces gens soient croyants). Boite à rythmes endormie, basse Field-Micienne, enchevêtrements de guitares, structure pop mais légèrement déviante, et la superbe voix douce et effacée de Marina, généralement exactement sur le même plan que les guitares, en subtil équilibre. Mais avant tout, une mélodie claire et limpide, jusqu'à cette juxtaposition finale magnifique. La clipée Nunca Estàs A La Altura présente elle un très beau torrent de guitares shoegazing qui portent une mélodie éclatante. Là encore, le morceau est organisé de manière moins simple qu'il n'y parait : l'évidence des couplets est contrebalancée par des breaks qui apportent des nouveaux arguments à un bel édifice. Mélangeant arpèges acoustiques, et électronique dansante, Rocanrolear (=>) catapulte en plein été, et offre à Marina l'occasion de susurer quelques mots avec une sensualité séduisante. Grand écart avec Mengele Y El Amor (=>), exercice de style plongé dans les musiques traditionnelles espagnoles, avec son refrain excessif fait de cordes dramatiques et de choeurs grandiloquents. C'est pas dénué d'intérêt, et ça pose une forme de contexte, donc pas si hors-sujet que ça. Clipée également, Flash-back Al Revès est une sucrerie pop-acoustique ensoleillée, débridée, sautillante, et timidement souriante (c'est du moins ce que fait passer la voix de Marina, très "entre deux"). Les violons à contre-emploi sur le refrain sont assez géniaux.



On prend ensuite la route sur l'Autovìa de Albacete (=>), balade (en camion, sérieusement ?) en pleine chaleur sur des lignes droites interminables. Un instant pour souffler. Avec son beat très Au Revoir Simone, Muerte en Plasencia peine un peu à trouver ses marques avant l'arrivée d'un refrain qui vient sauver le tout avec une belle mélodie vocale. Suit Crucifixiòn, La Soluciòn (=>) qui s'alimente en tension pour offrir des guitares lumineuses, et des violons divins. Une tension encore plus présente sur Ronnie O'Sullivan, qui évoque une construction post-rock, mais à laquelle il manque le petit côté épique qui en aurait fait une réussite. Dommage. Telèfono de la Esperanza, de son côté, se montre beaucoup plus classique, mais étale peut-être sa mélodie entêtante sur une durée légèrement trop importante.



La tuerie indie-pop, cette fois-ci au sens le plus habituel du terme, est pour La Mano de Santa Teresa de Jesùs (=>), qui dévoile une fuzz printanière entièrement au service d'une réelle évidence mélodique. C'est simple, frais et exaltant, une grande chanson tout simplement. En la Cama (=>) restranscrit ensuite avec une fidélité déconcertante l'atmosphère de la matinée passée à ne surtout pas sortir du lit, pour la simple et bonne raison que l'on y est pas tout seul. Autant dire flemme, douceur, et surtout quelques regards amoureux. Les brouillards matinaux résument d'ailleurs très bien l'entrée en matière vaporeuse de Lo Que No Cura Mata (=>), avant une prise de pouvoir des guitares qui se fait comme au ralenti, pour dessiner en définitive un paysage incandescent. C'est la sensation d'observer une étendue dévastée qui prédomine par conséquent sur la conclusion Sintigo o Sin Ti, habitée d'une pâleur usée, plume perdue qui chemine lentement vers le sol. Quelques instants de calme pour se remémorer ce qui fait le charme de ce premier album : Klaus&Kinski savent composer ces chansons qui collent si bien à certains moments, ces mélodies qui imprègnent et marquent, ces arrangements qui plongent immédiatement dans une atmosphère singulière. Largement de quoi les placer à l'époque en position de meilleurs espoirs du microcosme indie espagnol. Une promesse confirmée depuis la sortie cette année de leur second album, Tierra, Tràgalos ...

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