La première rencontre se fait donc avec Candy Bracelet (=>). Un instant pour le moins marquant, dans la mesure où l'ambiance qui se dégage du morceau est assez magique, mélange déroutant de couplets reposés et très intimistes, et de refrains ou de ponts que la guitare électrique éclaire d'une mélodie spacieuse. Une entrée en matière éclatante qui plonge immédiatement dans une des idées incontournables de Sarah Records : le monde entier, mais vu depuis ma chambre. L'enchainement avec Cloud Babies (=>) se fait dans la douceur extrême d'arpèges acoustiques qu'on ressent comme une caresse. Ils sont soutenus par un violoncelle qui contrebalance cette impression de légèreté. Mais c'est la voix de Keith Girdler qui porte la chanson, une voix naturellement belle et fragile, le plus souvent sur la ligne des sentiments déclamés avec calme et détachement, comme s'ils s'accompagnaient d'un clin d'oeil complice. Impossible ensuite de ne pas être frappé par Too Good To Be True (=>), véritable manifeste d'une façon d'être quelque peu en décalage, posé sur des accords qui savent rester au second plan. On appréciera aussi Fondette, spoken-word politique d'observatrice (on retrouve Gemma Townlet au chant) dépassée, sur fond de cordes désespérées.
Puis il est important de s'arrêter sur Sea Horses (=>), qui aurait été un single évident sur n'importe quel label (mais pas chez Sarah, où une chanson ne peut se trouver à la fois sur un single et un album). L'introduction électrique mais fluette pose une impression de tension esthétique, où l'émotion déliée se mêle à l'excitation. Le refrain est un éclair de beauté, mélodiquement immédiat, ciel bleu contagieux et rassurant ("Don't sigh, don't cry ..."). Superbe. Clear Skies opère dans la foulée avec malice, portée vers l'agréable par un balancement très bossa-nova. Retour de la guitare acoustique et des cordes délicates sur Happiness And Smiles (=>), sur laquelle la mélodie et le souffle de Keith jouent indéniablement avec mon coeur, comme sur un fil entre le tragique et le sourire vaguement embué. La conclusion est confiée à Amoroso (=>), description épique d'un paysage tour à tour figé puis agité ("Leaves are falling, mountains crumbling, she's in love with a memory."), sauce indie-pop. Le croisement des voix garçon/fille est une merveille, tandis que la guitare emprunte à Johnny Marr une part de génie qui entraine vers un final exaltant. Chacun retiendra ce qu'il souhaite de cet album : il faut bien dire qu'entre la fragilité assumée de Keith Girdler, son songwriting d'une élégance rare, les arrangements délicieux, ou plus simplement sa singularité, les ingrédients ne manquent pas. Et le cocktail constitue surtout un album particulièrement touchant, porte ouverte sur un univers personnel et sensible. "Yes too good, to be true, a dream come true ..."
3 commentaires:
Mélodie spacieuse ?
Ouais, t'as l'impression que c'est grand, éclairé, que le vent te souffle dans la figure, que t'es en plein air, tout ça quoi. Donc spacieux, ouais, c'est peut-être pas le meilleur mot, mais bon, j'avais pas vraiment mieux.
C'est assez beau comme formule "mélodie spacieuse".
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