Sur la face-A, on trouve Sun Was High (So Was I), mid-tempo monolithique et lo-fi, fuzz fatiguée en avant sur une structure totalement épurée (tout juste deux accords ?). Mais quel charme. Et dans ce tonnerre de sentiments, la mélancolie occupe une place de choix, tant on s'imagine une fin d'été à la chaleur insoutenable, les yeux défoncés par le soleil (et par le reste ?), l'esprit tourné vers une contemplation ("Watch the cars go by") passive car dépassée. Une lente inertie donc, et les souvenirs probablement destructeurs de quelqu'un qu'on refuse d'oublier, chantés dans ces "I thought of you ..." répétés par une Bethany à la voix fragile et maladroite, noyée sous les guitares, renforçant une tenace impression de solitude. Moment d'égarement intense, éclairé d'une lumière et d'un amour épuisés, pour une composition fatale de sincérité, qui frappe en plein coeur, puis le brise lors d'un fade-out éprouvant. Sublime.
Côté B se présente d'abord So Gone (=>), qui duplique la recette de la langueur et des guitares crades, tout en renversant les impressions données juste avant. Car ici, c'est Bethany la forte tête qui parle, avec une voix emplie d'insolence, pour décrire un garçon qui ne sait pas ce qu'il veut. Le je-m'en-foutisme n'est donc pas loin, autant dans le son que dans le ton, et on se laisse bien vite gagner par ce sourire ironique. La composition bascule surtout par les "Oooooh" placés à la fin, qui font glisser vers l'évidence une mélodie pop sur laquelle le reste n'insistait peut-être pas assez. C'est donc dans un sourire qu'on accueille That's The Way Boys Are (=>), reprise d'une sucrerie pop 60's (signée Lesley Gore). Une relecture en douceur, plongée dans une reverb typique, et où la guitare mène le train tout en évitant de se montrer envahissante. Sans atteindre la beauté fatale des travaux des Raveonettes, ni s'attarder sur la candeur de la version originale, Bethany se livre à une reprise plutôt coquine, terriblement malicieuse, irrésistiblement dansante. Outre le fait de marquer une influence, se dessine ici surtout la mesure du temps qui passe : dans une autre époque, Mademoiselle Cosentino aurait peut-être été l'égérie d'un girl group produit façon Phil Spector. Si les formes ont quelque peu changé, des filles parlent encore de garçons, et la pop, éclatante, reste le fil conducteur.
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