lundi 28 mars 2011

Out This Week #9 : The Pains Of Being Pure At Heart - Belong

Ils sont donc de retour. Ils n'avaient pas disparu, loin de là. Ils étaient même restés finalement très présents, comme en berçant notre été 2010 de leur Say No To Love. Mais le temps est venu, ce 28 Mars, de franchir une étape supplémentaire, pour The Pains Of Being Pure At Heart. Un groupe chéri depuis un peu plus de deux ans maintenant, pour avoir saisi à bras le corps la destinée d'une indie-pop (noisy ou anorak, selon les moments) qu'ils ont tout simplement sublimée, par le biais d'un premier album incandescent, et de chansons inoubliables. Un groupe qui sort donc aujourd'hui son deuxième album, intitulé Belong, encore et toujours chez Slumberland Records et Fortuna Pop! (avec le soutien de PIAS pour l'Europe). Et cet album, je l'ai attendu sans doute comme aucun autre. Peut-être parce que ce groupe m'est, justement, cher comme aucun autre. Que ces New-Yorkais m'ont embarqué avec eux un petit matin sans me laisser d'autre choix que de leur confier la bande originale de ma vie. Qu'ils m'ont fait tout oublier un soir de Mai 2009, lors d'un concert mémorable, propulsant une péniche entière higher than the stars. Pourquoi je vous raconte tout ça ? Pour justifier de l'absence totale d'objectivité des propos qui vont suivre. Parfois, le coeur a envie de parler, et il n'est à l'évidence pas le plus mal placé pour juger d'une histoire vécue aussi intensément.

Le nouveau chapitre s'ouvre avec la chanson titre Belong (=>), qui s'était vue décerner le titre d'hymne de mon printemps dès Février, quand avait été annoncé qu'elle serait un single. Les arpèges délicats (dans une évocation du Soon de My Bloody Valentine) sont bien vite emportés dans une bourrasque de fuzz qui peut surprendre tant elle marque l'arrivée aux commandes d'Alan Moulder et de Flood pour donner une identité sonore au groupe. Qu'importe, car la composition dévoile une mélodie pure et éclatante, mettant aussi en valeur la voix de Kip Berman, plus sensible que jamais. Les couplets sont ravagés, vont de questions en réponses (le "We tried each other, let's try another." inaugural se voyant répondre plus loin un "We tried another, let's try each other." résolu), puis le refrain s'envole en intensité. Puisque les choses sont lancées, on peut plonger dans Heaven's Gonna Happen Now (=>), petite bombe bien dans le style des productions précédentes : batterie et guitares affolées, mélodies craquantes, deuxième couplet emmené par la basse d'Alex Naidus, larsens disséminés par Christoph Hochheim (crédité très officiellement dans le livret, il faut le signaler), solo irrésistible, paroles à tomber de tendre naïveté. Rien ne manque au tableau, et comme au premier jour, il semble clair qu'on ne s'en remettra que difficilement. Et ce n'est pas Heart In Your Heartbreak (=>), single envoyé en éclaireur fin 2010, et joué la semaine dernière chez Letterman, qui viendra mettre en cause la qualité irréprochable des compositions.



Le premier vrai pari stylistique vient ensuite par l'entremise de The Body (=>), qui met comme rarement en avant le synthé de Peggy Wang, autour d'un gimmick rebondissant, puis de nappes glacées lors des refrains. Les guitares semblent en retrait, au contraire d'une basse très mouvante, et du jeu de batterie de Kurt Feldmann, qui claque et dépote façon New Order. Le résultat, c'est une folie noisy-discoïde autour de préoccupations adolescentes bien connues ("Tell me again what the body's for, cause I can't feel it anymore."), qui donne à la musique des Pains un vertige délicieux. Il est d'ailleurs dommage que la transition avec la ballade Anne With An E (=>) se fasse si brutalement. J'identifie ce passage comme, malheureusement, le seul point faible du disque, tant cette chanson, sans conteste pétrie de bonnes intentions, mais quelque peu convenue (ceci dit, le songwriting n'est pas mauvais en lui-même), vient briser un rythme infernal dont on aurait aimé qu'il ne retombe qu'une fois le disque définitivement arrêté. Peut-être que faire exploser ce morceau dans un bruit blanc aurait pu apporter un élan qui, je trouve, manque, mais après tout, c'est pas pour ce que j'ai écrit comme pop-songs que je peux donner quelque conseil que ce soit. Bref, une fois prise cette respiration, on se jette à corps perdu dans la superbe Even In Dreams (=>) qui constitue à mon sens la réussite ultime de ce nouvel album. Allez savoir ce que révèle chez moi cette ambiance nocturne et très années 1980, mais le groupe trouve ici une simplicité désarmante autour d'un couplet aux doux murmures, puis d'un refrain, amené dans l'excitation, où la fuzz éclate en même temps que l'émotion, comme on éclate en sanglots dans les bras de quelqu'un à qui l'on avoue qu'on l'aime. Le pont ouvre alors un champ de possibles renversant, une immensité à éprouver le coeur chancelant, particulièrement quand Kip ajoute d'un souffle un "And I do". Une chanson impossible d'évidence.


Il faut pourtant s'en relever car il reste de belles choses, à commencer par My Terrible Friend (=>) (deuxième référence aux Field Mice en autant d'albums, après la géniale This Love Is Fucking Right! ?). On y retrouve en première ligne le synthé cristallin de Peggy Wang, dans une ambiance qui renvoie énormément à leur Higher Than The Stars : batterie légère mais décidée comme une boîte à rythmes, refrains instrumentaux, sensation de s'échapper dans une lumière chatoyante. Les choeurs en font à peine trop, mais c'est de l'anorak-pop décomplexée et irrésistible, qui assume à merveille sa fragilité, son innocence, en ouvrant le droit de danser sur une mélodie rêveuse. C'est assez clairement parfait. De son côté, Girl Of A 1000 Dreams (=>) renvoie à une toute autre facette du groupe, celle du tout premier EP détraqué, il y a 4 ans déjà (2007, une éternité ...). Au menu, une fuzz délurée, une batterie sauvagement martelée, et une jeunesse incandescente, aux relents punk (gorge serrée, urgence totale), qui croise le fer avec les choix radicaux de The Jesus And Mary Chain (le feedback, encore et toujours). Le grand shoot d'adrénaline du disque, insolent et sans limite, forcément joussif. D'où un contraste déroutant quand s'ouvre Too Tough (=>), qui, dans sa construction (en particulier un pont qui laisse seule une guitare splendide de délicatesse), constitue un bel écho à Stay Alive, qui illuminait leur premier album. Un instant où les sentiments prennent une puissance rare, quand la fêlure ne peut que trop difficilement se cacher ("You're too tough, to say that it's all too much ..." ), que les blessures se rouvrent. Pourtant, la mélodie figure un soleil d'hiver fatigué mais idéal, qui tient autant d'une indéniable tristesse, que d'un lointain espoir, comme s'il n'était pas trop tard.


Et puisqu'il faut conclure, Strange (=>) déploie un beat quasi-Madchester, ouvrant la voie de guitares qui sonnent comme un rêve éveillé, une caresse tendre, guide d'une mélodie brillante qui se développe lentement, emporte tout dans un tourbillon affectif démesuré, celui d'une solitude vécue à deux, au creux d'un amour de gens étranges, contemplatifs, et qui, par dessus tout, croient en leur différence comme en une force. Un peu plus de quatre minutes pour susciter la sensation bouleversante d'une envie de danser jusqu'à l'épuisement, en fixant le ciel et les étoiles, seules limites valables quand plus rien n'a d'importance. Alors, l'impression est tenace : The Pains Of Being Pure At Heart sortent avec ce Belong une oeuvre dont il sera impossible de se défaire. Leur pari de diversifier la forme, en la rendant aussi plus forte et assurée, pouvait sembler risquer, tant leurs compositions vont chercher leur intensité dans une adolescence vécue et décrite comme une réalité écorchée. Pourtant, le résultat est un nouvel équilibre tout aussi intéressant : celui d'un groupe plus adulte mais qui ne se renie à aucun moment. Peut-être faut-il y comprendre que les coeurs purs peuvent aussi s'assumer, s'affirmer. Et autant pour eux que pour moi, je trouve ça rassurant.

1 commentaires:

D A N C E T O T H E T U N E R a dit…

Ça y est, je l'ai ! Et c'est tellement différent d'écouter un album, après avoir patienter pour l'avoir entre les mains, de déplier le livret, etc ... Une deuxième 1ère écoute, en quelque sorte. Il sera sûrement "impossible de s'en défaire", je suis bien d'accord !

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