mardi 22 mars 2011

Chez Sarah #11 : The Sea Urchins - Solace/Please Rain Fall [SARAH 8]

Si j'avais eu un tant soit peu de logique, ma série des "Chez Sarah" aurait commencé par The Sea Urchins. Pour la simple et bonne raison que le groupe de West Bromwich, juste au Nord de Birmingham, a ceci de spécial qu'il est la toute première référence de Sarah Records, leur single Pristine Christine ayant ouvert la destinée du label en 1987. Il faut dire que la formation, émergée en l'an de grâce C-86, avait sorti ses premiers flexi-discs, accompagnant des fanzines, respectivement avec Kvatch, édité par Clare Wadd, et Sha-la-la, dont un des principaux organisateurs n'était autre que Matt Haynes. Pas très étonnant donc de retrouver tout ce petit monde, qui s'était déjà pas mal tourné autour, une fois que le label de Bristol fut lancé. Mais la logique n'étant pas mon fort, je n'évoque la bande menée par James Roberts (au chant, et à la composition) qu'aujourd'hui, et par leur second single, le double face-A Solace/Please Rain Fall, sorti en Juillet 1988.

La première face-A s'intitule Solace (=>), produite par Joe Forster, un des fondateurs de Creation Records. Elle met en scène, dès l'ouverture, une guitare tranchante et délurée, ainsi qu'une batterie violente, à tel point qu'on se demande si l'on est bien chez Sarah Records. Heureusement, ces deux éléments, présents tout au long de la chanson, vont bien vite reculer dans l'agencement sonore, laissant s'exprimer un clavier complètement 60's, et surtout l'incroyable voix de James Roberts, nasillarde au possible, et pourtant toujours dans le ton, de sa plainte inimitable mais bêtement craquante. On se trouve fatalement bien vite entraîné par cette instrumentation quasi-garage-rock, qui cache pourtant une mélodie douce et ondulée du plus bel effet. Le grand moment est l'intervention impromptue d'un solo de guitare complètement classe, indiciblement déchiré et déchirant. Mais l'impression globale, sans trop que l'on sache pourquoi ni comment cette sensation émerge, c'est qu'un groupe estampillé Sarah, même en se permettant des choix radicaux, garde toujours ce rien de fragilité, si important.

La seconde face-A, par contre, est absolument dans le ton habituel du label de Bristol, au point d'atteindre même le rang de symbole. Please Rain Fall
(=>) est un de ces morceaux qui confèrent au mythe, car ils manient une imagerie tout simplement renversante. La pluie est en effet, allez savoir pourquoi, un de ces thèmes intouchables d'une indie-pop romantique et naïve, qui se plait à la contempler par-delà une fenêtre, les yeux perdus dans le vague, la tristesse sublimée. Cette chanson s'impose en exemple parfait, dévoilant un mid-tempo déprimé qui met en valeur des jangly-guitars Byrdsiennes magistrales, dont les arpèges ramènent à la beauté furtive d'instants idéaux. La voix de James Roberts traîne juste assez pour être totalement désarmante, jusqu'à cette montée pour un refrain chargé de sensibilité, marqué au plus profond par ces choses qui nous dépassent ("Right into my head, and all around me ..."). La mélancolie, soulevée par une mélodie à la fatigue sincère, s'immisce sans dire mot, comme suggérée par cette batterie qui frappe par minuscules touches, à la manière d'autant de gouttes d'eau. Mais, plus que de pluie, on comprend facilement qu'il s'agit sans doute d'un déluge ... de sentiments.

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